Le pasteur Joseph Doucé.
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Guillaume Perrodeau
Christophe Hondelatte revient aujourd'hui sur une mystérieuse affaire de disparition en 1990, qui concerne les Renseignements généraux.

Qui a tué le pasteur Joseph Doucé ? Vingt-huit ans après sa mort, le mystère demeure. Christophe Hondelatte revient sur cette affaire, sur laquelle plane toujours un point d'interrogation.

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Deux hommes et un mystère. Le soir du 19 juillet 1990, on sonne au domicile du pasteur Joseph Doucé, dans le 17ème arrondissement de Paris. C'est son compagnon de l'époque, Guy Bondar, qui raconte la scène. Il dit avoir vu deux hommes se présenter, comme s'ils étaient des policiers et emmener Joseph Doucé avec eux. Une affaire d'une trentaine de minutes, tout au plus, selon eux. Mais Joseph Doucé ne reviendra jamais. Son corps sera finalement retrouvé trois mois plus tard, dans la forêt de Rambouillet. Selon le médecin légiste, il a vraisemblablement été étranglé.

Dès le lendemain de sa disparition, Guy Bondar se rend au commissariat pour expliquer que son compagnon a disparu après avoir été emmené par des policiers. On l'envoie paître. L'avocate de Joseph Doucé se renseigne auprès des registres des gardes à vue. Aucune trace du pasteur, ni auprès de la justice, ni auprès de la police. Une plainte est finalement déposée, une instruction ouverte. Mais c'est finalement en se rapprochant de la personnalité de Joseph Doucé que l'affaire va connaître un éclairage nouveau.

Joseph Doucé et la pédophilie. C'est Dominique Rizet qui publie un premier article dans Paris Match, à l'époque. Joseph Doucé n'était pas un prêtre parmi d'autres. Formé par les curés, il s'est converti au protestantisme, celui des églises baptistes américaines. À Paris, il a créé le centre du Christ libérateur, qui accueille les minorités sexuelles : gays, lesbiennes, transsexuelles, sadomasochistes, mais aussi… les pédophiles. Joseph Doucé a d'ailleurs écrit un livre à ce sujet : La pédophilie en question, dans lequel il développe des thèses scabreuses et explique vouloir dépénaliser la pédophilie. Il avait même un groupe de paroles où il accueillait des pédophiles, le dimanche.

Les RG impliqués ? Sil n'y a rien de concret au niveau de l'enquête, les rumeurs, elles, courent : Joseph Doucé savait des choses, il pouvait faire tomber des gens, des hauts placés qui aimaient les enfants. Et il aurait été réduit au silence pour ces raisons. Car dans son article, Dominique Rizet révèle aussi que les Renseignements généraux (RG) filaient le pasteur Doucé depuis un moment et suivaient de près les fameux groupes de parole pédophiles du dimanche soir. Une surveillance qui s'est intensifiée durant les deux mois qui ont précédé sa disparition.

Sous l'autorité des RG, quatre policiers étaient affectés à la surveillance de Doucé, chapeautés par l'inspecteur Jean-Marc Dufourg. Ces cinq hommes sont convoqués et on demande à Guy Bondar si l'un d'eux était présent le samedi soir de la disparition. Il en reconnaît un : Jean-Marc Dufourg. Mais il l'a vu un mois avant, pas le soir de la disparition. Avec un autre homme, en juin, il était venu tambouriner à la porte du couple. L'inspecteur reconnaît que, éméché, il a bien frappé à la porte en pleine nuit. Mais la question qui se pose et qui intéresse la justice, c'est de déterminer si ces cinq hommes ont pu enlever Joseph Doucé…

Non-lieu prononcé en 2007. Le soir de la disparition, ils étaient bien dans le quartier, pour rencontrer un "indic", mais après, on les a vus ailleurs. L'alibi tient. Interrogé par la juge d'instruction, Jean-Marc Dufourg "s'amuse" : il accuse sa hiérarchie de lui faire monter des coups pour mouiller des gens importants de la politique et de la télévision. Son avocat, Jacques Vergès, l'entoure bien. L'enquête ne permet pas de l'impliquer dans la disparition et la mort du pasteur.

En 1991, il est révoqué des RG pour une autre affaire, car il a tiré une balle, de colère, dans la porte d'un indic. Ses collègues sont suspendus plusieurs mois. Mais il n'y aura rien de plus. "Il y a peu de chances que l’on connaisse la vérité un jour", explique Francis Zamponi, auteur du livre Les RG à l’écoute de la France de 1981 à 1997. "Pour moi, mais c'est une idée très personnelle, le pasteur Doucé a été embarqué pour être interrogé de façon musclée. Cela a pu mal tourner et le corps abandonné", confie Francis Zamponi. On n'a jamais retrouvé les deux hommes qui sont venus chercher Joseph Doucé le soir du 19 juillet 1990. L'affaire est judiciairement close depuis le 24 octobre 2007 et l'ordonnance de non-lieu signée par le juge Marc Trévidic.

>> Retrouvez ci-dessous l'intégrale d'Hondelatte Raconte, "L’étrange disparition du pasteur Doucé" avec Francis Zamponi :

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