Les théories du complot relèvent d'"un scepticisme dogmatique"

Rudy Reichstadt, Conspiracy Watch, Europe 1, 1280 1:41
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Grégoire Duhourcau , modifié à
L'organisation Conspiracy Watch a établi un rapport sur les théories complotistes en 2018. Son patron, invité de Matthieu Noël sur Europe 1 lundi, explique que la propagation de ces théories "est beaucoup plus rapide aujourd'hui".
INTERVIEW

Les théories du complot sont en progression dans la société. Selon le site Conspiracy Watch, qui a établi un état des lieux du complotisme en 2018, ces théories tournent autour de quatre thèmes : la politique, les relations internationales, la géopolitique et la santé. "Les grandes théories sont des théories historiques, qui sont dans le paysage depuis longtemps. Par exemple, la mort de Lady Di qui serait un assassinat maquillé", explique Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, au micro de Matthieu Noël sur Europe 1.

Si douter d'une information qui nous est rapportée est plutôt sain, avec les théories complotistes, "on n'est pas dans le doute", estime encore Rudy Reichstadt. "On est dans un scepticisme dogmatique. Et surtout, ce que l'on observe chez les complotistes, c'est une forme d'asymétrie entre une hyper-critique d'un côté, sur tout ce qui va dans le sens de leurs théories du complot, et une hyper-crédulité à l'égard de tout ce qui conforte leurs théories du complot."

Une propagation "beaucoup plus rapide aujourd'hui"

Rudy Reichstadt précise par ailleurs que la propagation de telles théories "est beaucoup plus rapide aujourd'hui", notamment avec le développement des réseaux sociaux. "Aujourd'hui, lorsque vous avez un attentat, un événement marquant en général, on l'a vu encore récemment avec l'incendie de Notre-Dame de Paris, c'est immédiat sur les réseaux sociaux", précise-t-il.

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Et ces théories "représentent un danger pour la démocratie". Tout d'abord parce qu'elles "sont liées à une radicalité politique, elles sont liées statistiquement à une sympathie pour les extrêmes politiques". Par ailleurs, "dans une société, lorsque vous ne partagez plus la même réalité avec une fraction de la société, le débat démocratique se condamne à être un dialogue de sourds. On ne peut pas déterminer ensemble le bien commun si on ne partage plus la même réalité". Pour Rudy Reichstadt, ce dernier point "est inquiétant".

"Il faut essayer de convaincre les gens qu'ils ont de très bonnes raisons de douter de ces théories du complot"

Il est donc important de combattre les théories conspirationnistes mais cela ne peut se faire sur le terrain de la loi. "Il n'y a pas de loi contre le complotisme, qui relève de l'opinion. On a le droit de penser des bêtises, on a le droit de penser des choses contestables", relève Rudy Reichstad. Le levier passe donc par "la contre-argumentation, principalement". "Il faut essayer de convaincre les gens qu'ils ont de très bonnes raisons de douter de ces théories du complot." 

Malheureusement, "vous aurez toujours une partie du public qui sera passée de l'autre côté du miroir et que l'on ne pourra pas convaincre". Il s'agit donc de "parler à la grande majorité des gens qui sont quand même raisonnables". "On peut se poser des questions sans être paranoïaque", conclut Rudy Reichstad.