Le demandeur d'asile est "maltraité" par le projet de loi immigration

Le texte présenté mercredi privilégie "la prétendue efficacité plutôt (que) la prise en compte du contradictoire et des droits fondamentaux", déplore Jacques Toubon.
Le texte présenté mercredi privilégie "la prétendue efficacité plutôt (que) la prise en compte du contradictoire et des droits fondamentaux", déplore Jacques Toubon. © LUDOVIC MARIN / AFP
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avec AFP , modifié à
"Contrairement au discours qui veut que tout soit fait en faveur du demandeur d'asile, il est en fait maltraité par ce projet", a déclaré Jacques Toubon au "Monde".

Le Défenseur des droits Jacques Toubon estime que le demandeur d'asile est "maltraité" par le projet de loi sur l'asile et l'immigration porté par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, dans un entretien au Monde daté de vendredi. "Contrairement au discours qui veut que tout soit fait en faveur du demandeur d'asile, il est en fait maltraité par ce projet", déclare-t-il, soulignant que "ce n'est pas en s'alignant sur les thèmes du Front national qu'on va faire reculer ses votes".

"Des délais impossibles à tenir". Selon lui, le demandeur d'asile va se retrouver "pris dans des procédures tellement accélérées qu'elles confinent à l'expéditif". Il dénonce les "délais impossibles à tenir, notamment pour déposer un recours devant la Cour nationale du droit d'asile". Le texte présenté mercredi en Conseil des ministres privilégie "la prétendue efficacité plutôt (que) la prise en compte du contradictoire et des droits fondamentaux" alors que, d'après lui, "la situation n'appelle pas de loi nouvelle". "Ce n'est pas en s'alignant sur les thèmes du Front national qu'on va faire reculer ses votes", tacle l'ancien ministre.

Pas de "crise". "Le solde migratoire reste le même depuis des années. (...) Le nombre d'entrées et de sorties varie légèrement d'une année sur l'autre, mais ne s'apparente en rien à une 'crise' qui nécessiterait de légiférer rapidement", juge Jacques Toubon. "Il faut arrêter de faire croire qu'on est capable de 'maîtriser les flux migratoires', comme on le dit depuis 1974, pour s'atteler au vrai sujet : construire une politique publique qui organise les parcours migratoires", tranche-t-il. "Quand le chef de l'Etat dit (...) qu'il ne veut plus de gens qui dorment dehors, il a envie, à juste raison, de modifier cette réalité. Mais ce n'est pas la nouvelle loi qui opérera ce changement", assure Jacques Toubon. 

De nombreuses critiques. Très critiqué par les associations, le projet de loi vise notamment à réduire à six mois les délais d'instruction de la demande d'asile et à faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés, tout en lançant quelques pistes pour améliorer le séjour des personnes vulnérables.