LA QUESTION SEXO - Mes voisins font l'amour la fenêtre ouverte, que dois-je faire ?

Question Sexo Voisins logement
Les voisins de Mathis s'adonnent à l'exhibitionnisme depuis leur logement. (Photo d'illustration.) © Philippe LOPEZ / AFP
  • Copié
Catherine Blanc
Mathis a constaté que ses voisins avaient tendance à faire l'amour rideaux ouverts et fenêtres ouvertes, ce qui cause chez lui une certaine gêne. La sexologue et psychanalyste Catherine Blanc lui répond dans l'émission "Sans Rendez-vous" sur Europe 1, vendredi.

Les voisins de Mathis ont des tendances exhibitionnistes : ils n'hésitent pas à profiter tout le voisinage de leurs ébats sexuels, en ouvrant les rideaux et même les fenêtres la nuit. Ce comportement provoque chez cet auditeur d'Europe 1 un certain malaise. La sexologue et psychanalyste à Paris Catherine Blanc répond à ce problème dans l'émission Sans Rendez-vous sur Europe 1, vendredi. 

La question de Mathis

"Mes voisins ont tendance à faire l'amour les rideaux ouverts et la nuit, ils font l'amour la fenêtre ouverte. Ils en font profiter tout le voisinage. À votre avis, est-ce considéré comme de l'exhibitionnisme ? Est-ce que je dois leur dire quelque chose ?"

La réponse de Catherine Blanc

"Le fait que certains ont besoin de montrer leurs performances sexuelles fait partie de leur excitation, d'imaginer que d'autres sont en désir de quelque chose, qu'ils ne peuvent pas les vivre quand on les vit soi-même. C'est une façon de se dire que 'moi, je vis quelque chose, je prouve que je vis quelque chose que les autres ne vivent peut-être pas'. 'Je vous montre à quel point je le vis parce qu'en plus, je le théâtralise'. C'est carrément de l'exhibitionnisme.

Ce qui est intéressant, c'est de se dire que cette volonté d'exhiber sa sexualité, c'est pour se rassurer quant à son pouvoir. C'est pour gêner l'autre et avoir ainsi un double pouvoir : c'est le pouvoir de ce que je fais et le pouvoir de faire rentrer l'autre à son insu. C'est typiquement l'exhibitionnisme du jardin public, c'est l'idée que je peux les exciter et l'idée que je peux les déranger, ce qui me donne un pouvoir suprême. C'est une façon de les faire rentrer, contre leur gré, dans le cadre de ma vie privée et de ma sexualité."

Cela peut-il être comparé au fait de prendre en photo ses plats pour les montrer aux autres ? Une sorte de victoire sur son voisin ?

"C'est ou pour montrer que je mange ce que vous ne mangez pas, ou pour se rassurer que je mange quelque chose d'extraordinaire. Il peut y avoir un côté extrêmement pervers puisque c'est réduire l'autre à l'état d'objet, c'est-à-dire que l'autre n'est plus sujet de la situation, à moins de l'inviter pour qu'il soit sujet et qu'il ait le désir de l'être. Sinon, la personne était en train de dormir et tout d'un coup, elle est avec une histoire sexuelle, une histoire pornographique, le cas échéant dans sa tête. Donc, elle est tout d'un coup contrainte à voir même ce qu'elle ne voit pas, puisqu'elle l'entend.

C'est pareil pour les enfants, comme on l'entend beaucoup dans le cadre des consultations psy. Il y a des adultes qui ont été énormément perturbés par une grande démonstration d'un pouvoir de l'un sur l'autre, souvent de l'homme sur la femme, qui fait que l'enfant essaie de ne pas entendre pour ne pas participer. D'un point de vue psychique, l'enfant a le sentiment d'avoir participé à la sexualité parentale, d'y avoir pris part et c'est extrêmement traumatisant. Ce n'est pas une allure incestueuse, mais incestuelle, c'est-à-dire qu'il a vraiment le sentiment d'avoir participé à une sexualité."

Mathis peut-il leur envoyer un message ou appeler la police ?

"D'abord, si ça le dérange, il est intéressant de savoir pourquoi ça le dérange. On a tous un degré d'acceptation de la présence de l'autre. Pourquoi est-ce lui qui doit se barricader et fermer ses fenêtres ? Au niveau de la loi, cela doit être sur le même versant que l'atteinte à la pudeur. On vient déranger la pudeur de l'autre, mais nous avons le droit d'être pudique : ce n'est pas parce que nous sommes dans une société où on parle de sexualité, où on rigole de sexualité que nous sommes tous dans le devoir d'être à ce niveau, de parler, de voir, d'entendre la sexualité de son voisin. La meilleure des choses est d'aller le dire à son voisin que ça suffit. Et sinon, il faut aller porter plainte."