La justice teste les résolutions à l'amiable pour désengorger les tribunaux

Tribunal justice créteil 1280
© ERIC FEFERBERG / AFP
  • Copié
Chloé Triomphe, édité par R.Da. , modifié à
REPORTAGE - Onze tribunaux en France proposent actuellement des procédures de médiation, notamment dans les affaires familiales, plutôt que des procès. Une pratique qui pourrait être étendue à d'autres domaines et généralisée.
L'ENQUÊTE DU 8H

La médiation est-elle l'avenir d'une justice engorgée et au bord de l'asphyxie ? Depuis le mois de mars, onze tribunaux testent la méthode en matière familiale. À Créteil, le président a annoncé mercredi que l'expérimentation allait s'étendre à tous les conflits : commerciaux, bancaires, litiges du quotidien et même aux prud'hommes.

La médiation est proposée dès que possible, y compris jusqu'au jour du procès, comme a pu le constater Europe 1, qui a pu assister à l'une de ces audiences innovantes.

Une médiation de dernière minute. Mercredi, au fond de la salle d'audience, Robert, un agent immobilier, attend son tour. Il a emprunté 80.000 euros à une amie et suite à des contretemps dans son projet, il n'a pas pu honorer ses remboursements, ce qui lui a valu une assignation au tribunal. Fabrice Vert, le président, leur fait une proposition de dernière minute : "Est-ce que, dans cette affaire, une médiation, vous conviendrait ?" L'agent immobilier hésite, et finit par accepter. Il quitte donc la salle avec l'avocate de la partie adverse, pour le bureau du président, ou un conciliateur les attend ; Alain Yung, chef d'entreprise à la retraite, les installe confortablement.

Le soulagement de justiciable. "L'important c'est que les personnes se sentent à l'aise et puissent s'exprimer. Nous, on est là pour faire ressortir l'équité quand le juge applique la règle de droit. Mais règle de droit n'est pas toujours équitable", pointe-il auprès d'Europe 1. La négociation, en forme de conversation, dure une petite heure, et finalement un accord est trouvé entre les deux parties. "On va faire un échéancier, si vous êtes d'accord. Il est bien évident que si l'une des échéances n'est pas honorée, c'est fini pour vous", avertit Alain Yung. L'agent immobilier, de son côté, propose un paiement mensuel de 5.000 euros. "Je suis persuadé qu'avant la fin de l'année 2018 je rembourserai tout", assure-t-il.

Après avoir signé, Robert quitte la pièce, aussi soulagé qu'étonné. L'homme pensait venir pour être condamné par le juge. "Je suis surpris que l'on m'ait proposé ça. J'étais résigné, je pensais que j'allais être condamné et que des huissiers allaient venir pour me faire payer", confie-t-il. "Ce qui s'est passé me permet d'avoir une solution que je pense vraiment pouvoir tenir", conclut-il.

Une exception susceptible de devenir la règle. La médiation au niveau national représente quelques pourcents seulement des affaires civiles traitées. La loi incite pourtant les juges à y avoir davantage recours, en matière familiale par exemple, violences exceptées. Elle pourrait même devenir obligatoire avant de saisir un juge. Un premier bilan des expérimentations est attendu en janvier prochain.