"Je me suis toujours dit que j'allais m'en sortir" : le combat de Christian Streiff, cet "homme pressé" victime d'un AVC

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Anaïs Huet , modifié à
À l'occasion de la sortie en salles mercredi du film "Un homme pressé", inspiré de son histoire, Christian Streiff, ancien patron de PSA, est venu raconter sur Europe 1 son combat pour retrouver ses facultés après son AVC.
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Il y a dix ans, Christian Streiff était le patron du groupe automobile PSA, en pleine crise. L'homme, qui se décrit lui-même comme "pressé", ne compte pas ses heures, ni les litres de stress qu'il avale quotidiennement dans des tasses à café. Puis, au matin du 11 mai 2008, ce quinquagénaire se sent mal et s'allonge.

La mémoire et le langage touchés. "Ce matin-là, j'ai fait un petit somme comme il m'arrive souvent de le faire. Cinq minutes pour recharger les batteries. Mais je ne me suis pas réveillé", a-t-il raconté à Nikos Aliagas, mercredi matin sur Europe 1. De cet épisode, Christian Streiff n'a gardé aucun souvenir. Il vient de faire un grave AVC, qui touche la partie du cerveau consacrée à la mémoire et au langage. "Mon chauffeur m'a embarqué rapidement jusqu'à la Pitié-Salpêtrière", salue-t-il. C'est grâce au réflexe de cet homme qu'il a la vie sauve.

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"Je travaillais énormément". En tant que patron, Christian Streiff était pourtant bien suivi médicalement. "Personne n'avait rien remarqué, et je pense que rien n'était remarquable. La difficulté, c'est que ça peut vous tomber dessus, que vous travailliez beaucoup ou peu. C'est vrai que je travaillais énormément, je buvais beaucoup de café, je dormais peu… On était au début de la crise. En 2008, l'automobile allait très très mal, ça me préoccupait énormément. C'est l'un des facteurs, mais est-ce le seul ? Je ne pense pas", avance-t-il.

"J'avais oublié l'essentiel des mots". Commence alors un long processus qui durera trois ans, au cours duquel Christian Streiff va devoir "tout réapprendre". Lire, écrire, compter. Comme un enfant. "Ce que j'avais oublié, c'est l'essentiel des mots pour parler correctement. Je reconnaissais le verre mais j'étais incapable de trouver le mot. Les orthophonistes, ma femme et les gens autour de moi m'ont énormément aidé. J'ai passé beaucoup de temps avec un imagier", décrit le rescapé, qui a publié le livre J'étais un homme pressé, dans lequel il raconte son histoire et son combat.

Entendu sur europe1 :
J'ai appris à écouter, ce que je faisais très peu avant

Un exemple de combativité. Avec une force de caractère épatante, l'ancien patron a relevé ses manches et s'est attelé à cet immense défi. "Je me suis toujours dit que j'allais m'en sortir. J'allais travailler comme je l'avais toujours fait, avec la même énergie. Finalement, j'ai réussi", confie-t-il avec fierté. Aujourd'hui, Christian Streiff a retrouvé l'essentiel de son vocabulaire et de sa diction. "Le message que j'essaie de passer à tous les gens qui ont eu un AVC, c'est 'battez-vous'. Il n'y a pas de fatalité. Même quand on est gravement atteint physiquement", encourage-t-il. Après la parution de son livre, Christian Streiff a reçu beaucoup de courriers de personnes ayant survécu à un AVC. Un homme, notamment, lui a écrit par l'intermédiaire de sa femme, car il ne pouvait pas tenir le stylo. "Dans son dernier message, il disait 'cette fois, c'est moi qui l'ai écrit'", se réjouit-il, ému d'avoir pu contribuer à lui donner de la force par son exemple de résilience.

Dix ans après, et alors que sort mercredi en salles le film Un homme pressé, inspiré de son histoire et avec Fabrice Luchini pour l'incarner, Christian Streiff tire les leçons de son expérience avec sagesse. "J'ai deux vies aujourd'hui, la première et la deuxième. J'ai appris à écouter, ce que je faisais très peu avant. Et j'ai appris ce que c'est que le temps."