Fabienne Kabou souffre d'une "paranoïa délirante", selon l'expert psychiatre

Pour l'expert psychiatre Daniel Zagury, Fabienne Kabou "délire du début à la fin".
Pour l'expert psychiatre Daniel Zagury, Fabienne Kabou "délire du début à la fin". © BENOIT PEYRUCQ / AFP
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C.P.-R. avec AFP , modifié à
Depuis mercredi, psychologues et psychiatres défilent devant la cour d'assises de Saint-Omer pour tenter de déterminer si Fabienne Kabou est atteinte ou non d'une pathologie mentale. 

Une femme, très intelligente, certes, mais qui délire "du début à la fin". Ces mots, l'expert psychiatre Daniel Zagury les a posés devant la cour d'assises de Saint-Omer, au quatrième jour du procès de Fabienne Kabou, accusée d'avoir tué sa fille de 15 mois. Le soir du 19 novembre 2013, cette femme d'origine sénégalaise a déposé sa petite Adélaïde à marée montante, sur la plage de Berck-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais.

"Son récit est dominé par l'intellectualisation". Et Daniel Zagury, appelé à la barre jeudi, est formel : Fabienne Kabou est bien malade, présentant une "pathologie psychiatrique de type paranoïa délirante". L'accusée est même un "cas historique", souligne le spécialiste. Depuis la veille, ses confrères psychologues et psychiatres sont entendus par la cour d'assises pour tenter de percer la personnalité complexe de Fabienne Kabou et in fine, répondre à la question de la responsabilité de l'accusée.

Devant la cour, Daniel Zagury déjà sollicité par la justice sur les cas illustres de Guy Georges ou Michel Fourniret, revient sur sa première rencontre avec Fabienne Kabou. Déjà, "ma première impression face à [elle] était singulière : elle a un langage de grande précision, son récit est dominé par l'intellectualisation et elle présente les faits comme une énigme", développe-t-il. 

La sorcellerie, manifestation "soft" du délire. A Daniel Zagury, l'accusée avait affirmé avoir été "poussée par une force extérieure" au moment des faits. Et le spécialiste d'analyser : plongée "dans son délire", Fabienne Kabou a tué sa fillette car elle se sentait "menacée par un danger pire que la mort", par des "forces extérieures". Pour elle, son acte revêt "une dimension altruiste", ajoute le psychiatre de renom. Lorsqu'elle invoque la sorcellerie pour expliquer son acte, c'est "la version soft de son délire", décrypte-t-il. Autrement dit, Fabienne Kabou y adhère, "par défaut", ne trouvant pas d'autres explications pour rationaliser son geste. 

Il est impossible, pour Daniel Zagury, qu'elle simule la folie ou brandisse la sorcellerie pour se dédouaner de son crime ou espérer une condamnation plus clémente. L'expert est catégorique : "C'est exclu, non seulement Fabienne Kabou minimise les phénomènes" irrationnels, "mais elle les soumet au doute critique". Bien sûr, Fabienne Kabou parle avec détachement de ce jour où elle a abandonné sa fille "Ada" à la mer, bien sûr Fabienne Kabou ment parfois. Mais, "si on la fait passer pour une petite menteuse, on passe à côté d'un cas historique. C'est une grande délirante", insiste Daniel Zagury.

"J'ai compris, je suis malade". Toutefois, il y a chez cette femme à l'intelligence supérieure "une forme de résistance" à l'irrationalité, une tendance à intellectualiser "ses délires", qui explique "la particularité du cas Kabou". Dans son expertise, Daniel Zagury n'a pas retenu l'abolition totale du discernement, mais a tout de même conclu à un "discernement altéré" dans une très large mesure au moment des faits.

D'après l'avocate de Fabienne Kabou, Me Fabienne Roy-Nansion, qui en a informé la cour, sa cliente commencerait à prendre conscience de son état. Pour la première fois, elle aurait reconnu dans la matinée : "Ok, j'ai compris. Je suis malade".