Encadrement des loyers à Paris : un bailleur sur deux louant en direct encore dans l'illégalité

Les abus se concentrent principalement sur les petites surfaces.
Les abus se concentrent principalement sur les petites surfaces. © AFP
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avec AFP , modifié à
Près d'un particulier sur deux qui loue son bien immobilier en direct ne respecte pas l'encadrement des loyers à Paris, notamment pour les petites surfaces.

Près d'un propriétaire bailleur sur deux loue encore trop cher à Paris lorsqu'il se dispense des services d'un agent immobilier, un an après l'entrée en vigueur de l'encadrement des loyers, et ces abus sont concentrés sur les studios meublés pour étudiants et jeunes, selon une étude publiée mardi.

Une grande majorité des professionnels respecte la nouvelle loi. En revanche, les trois quarts des annonces passées par les professionnels respectent le loyer maximum autorisé par la loi, selon l'étude de l'association de consommateurs CLCV (Consommation, logement et cadre de vie). La CLCV a examiné 800 petites annonces publiées sur huit sites Internet - pap.fr, leboncoin.fr, fnaim.fr, century21.fr, seloger.com, orpi.com, foncia.com et nexity.fr, avec un partage égal, tant entre locations nues et meublées qu'entre propriétaires bailleurs et agents immobiliers.

Ces résultats sont en légère amélioration : les taux de conformité étaient respectivement de 70% (via les agences) et 47% (pour les bailleurs en direct) trois mois après le début de l'encadrement des loyers, instauré en août 2015 par la loi Alur. Pourtant, près de quatre loyers sur dix (38%, contre 42% un an plus tôt) ne sont "pas conformes et excèdent, en moyenne de 115,39 euros par mois, soit 1.384,68 euros à l'année, le montant maximum applicable", constate la CLCV, pointant un "préjudice financier important" pour le locataire. Ce "surplus" perçu par le bailleur atteignait 4.500 euros annuels, pour un logement du 18ème arrondissement.

Des abus concentrés sur les "chambres de bonnes". Il ressort néanmoins que 75% des annonces passées par les agences immobilières sont conformes à l'encadrement des loyers, contre seulement 51% de celles émanant d'un particulier qui loue en direct. Ces abus se concentrent sur les petites surfaces et la "fameuse chambre de bonne" : 46% des annonces de studios à louer dans la capitale affichent un loyer excessif, contre 12% pour les quatre pièces. 

Subsiste ainsi la "pratique des bailleurs consistant à fixer un loyer abusivement élevé pour les petits logements", constate la CLCV. "Or, ce sont principalement les jeunes et étudiants qui en sont locataires, soit un public relativement fragile économiquement", déplore-t-elle. Les abus demeurent plus fréquents pour les meublés (54% de conformité) que pour les logements nus (72%) avec un montant moyen du dépassement supérieur : 129 euros pour les premiers, 93 euros pour les seconds.

Une mesure "utile". La loi a toutefois "contribué à assagir le marché, puisque 62% des annonces sont dans les clous, c'est donc une mesure utile", analyse François Carlier, délégué général de la CLCV. "Mais si l'an dernier on pouvait se dire qu'on essuyait les plâtres, 13 à 14 mois après, on en est encore à 38% de loyers qui ne respectent pas la loi : c'est toujours trop élevé, il y a relativement peu de progrès", estime-t-il.

D'autre part, un loyer sur quatre reste illégal sur les sites des agences immobilières : or les professionnels "se doivent de refuser, tant d'un point de vue juridique que déontologique, toute demande émanant d'un propriétaire exigeant un loyer qui excède les plafonds applicables".

La CLCV demande "des sanctions". Au vu de ces constats, la CLCV demande "des sanctions" à l'encontre des bailleurs, à l'instar de l'amende qu'ils encourent s'ils exigent d'un candidat locataire un document interdit par les textes (3.000 euros pour un particulier, 15.000 euros pour une personne morale). Quant au site pap.fr, il affiche le plus fort taux d'annonces "hors la loi", soit 50%. "On peut déconseiller aux locataires d'y aller : c'est là qu'on trouve les loyers les plus chers", dit François Carlier.

La CLCV veut aussi une extension du plafonnement aux "autres zones concernées par la cherté des loyers", comme prévu par la loi Alur. À Paris, à la signature d'un nouveau bail ou lors d'un renouvellement, le loyer d'un logement ne peut dépasser de 20% un loyer de référence fixé par arrêté préfectoral, selon le nombre de pièces et la période de construction, ni lui être inférieur de 30%, sauf exceptions bénéficiant d'un "complément de loyer".