En France, il y a ceux qui meurent tard, et les autres

Cimetière mort
© JAIME REINA / AFP
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G.S.
L'écart entre ceux qui meurent tôt et ceux qui meurent tard ne se réduit plus, ni en France, ni en Angleterre.

Ceux qui ont la chance de vivre longtemps vivent de plus en plus longtemps. Mais tout le monde n'a pas cette chance ! C'est en substance la conclusion d'une étude de la Cass Business School et de l'International Longevity Centre UK, qui ont étudié l'évolution de l'espérance de vie en Angleterre, au Pays-de-Galles, en Italie et en France. Ou plutôt DES espérances de vie : les chercheurs ont mesuré les différences d'âge entre les 10% d'adultes morts le plus jeune et les 5% d'adultes morts le plus vieux. Résultats : si l'espérance de vie moyenne a augmenté quasiment sans discontinuer, l'écart entre ceux qui meurent tôt et ceux qui meurent tard ne se réduit plus en France et en Angleterre.

37 ans d'écart chez les hommes en France. Chez les hommes, c'est en France qu'il y a le plus grand écart entre ceux qui meurent tard et ceux qui meurent tôt. Un peu plus de 5% des Français décèdent au-delà de 96 ans, mais il reste 10% de la population qui meurt en dessous de 60 ans. L'écart est ainsi de près de 37 ans en France, alors qu'il est de 33,3 ans en Angleterre et au Pays de Galles et de "seulement" 31,7 ans en Italie.

En Italie, d'ailleurs, ces inégalités d'espérances de vie baissent sans discontinuer pour les hommes depuis 1870. Mais en France, après une baisse de 18% entre 1870 et 1950, cela n'a plus bougé depuis 60 ans. En l'Angleterre, les inégalités en la matière se sont même creusées de 1,7% depuis les années 90, après une énorme baisse entre 1870 et 1960.

En Europe, "la première moitié du XXe siècle s'est caractérisée par une réduction des écarts en matière d'espérance de vie, les améliorations en matière de propreté de l'eau, de logement, de revenus et de santé ayant bénéficié à l'ensemble de la population", explique Les Mayhew, l'auteur du rapport. Mais selon l'étude, l'écart a cessé de diminuer en France car c'est le mode de vie qui influence désormais les espérances de vie, et non plus l'environnement. "Parmi les facteurs les plus importants en ce qui concerne le mode de vie, on retrouve le tabagisme, la boisson et une mauvaise alimentation, qui sont tous trois plus représentés dans les classes les plus pauvres de la société", analyse encore Les Mayhew.

30,6 ans chez les femmes. Pour les femmes, c'est en Angleterre et au Pays de Galle qu'il y a le plus d'inégalités, avec un écart de 31 ans entre celles qui meurent le plus tard et celles qui meurent le plus tôt, contre 28,2 ans en Italie et 30,6 ans en France. Aujourd'hui, 5% des Française meurent a plus de 99 ans, mais il y en a encore 10% qui meurent en dessous de 70 ans. Si l'écart continue de se réduire en Italie, il a cessé de baisser à la fin des années 90 en Angleterre et en France, après une baisse continue de 120 ans.

"Ce rapport souligne comment, malgré une augmentation significative de l'espérance de vie moyenne, l'écart entre les riches et les pauvres s'accroît pour la première fois depuis les années 1870", commente Sally Greengross, directrice générale de ILC-UK. Les auteurs du rapport en appellent, en guise de conclusion, à une réponse politique : "la réponse à ce problème n'est pas de redistribuer les dépenses de santé, mais de changer les habitudes et modes de vie. Des outils politiques plus puissants destinés à engendrer des changements de comportement seraient nécessaires pour orienter la population vers des modes de vie plus sains".