À 47 ans, son père contrôle toujours sa vie (et son argent) : "J'ai un père castrateur"

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Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
Shirley qualifie son père de castrateur. Elle raconte que ce dernier l’empêche notamment d’aller s’installer en France et contrôle son argent, alors qu’elle est âgée de 47 ans. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Shirley demande conseil à Olivier Delacroix pour se libérer du joug de son père. 
TÉMOIGNAGE

Shirley a beau avoir 47 ans, son père contrôle sa vie. Elle raconte que ce dernier l’empêche notamment de réaliser son rêve de s’installer en France. Shirley explique, en effet, vouloir refaire sa vie loin de lui pour échapper à son contrôle. Selon elle, son père est devenu d’autant plus protecteur après le décès de sa mère, survenu il y a sept ans. Au micro d’Olivier Delacroix, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Shirley évoque sa relation tourmentée avec son père, qu’elle qualifie de castrateur.

"J’habite au Québec. J'ai 47 ans. J'ai un père que je qualifierais de castrateur, en ce sens qu’il veut tout contrôler. Il y a sept ans, ma mère est décédée et j’ai eu un héritage. Mon père a confié mon héritage à une fiducie. Il me donne mille dollars canadiens par mois. Je veux m'éloigner, je veux partir. Je veux aller vivre en France. Mon père dit que ça n'a pas de sens et bloque mes projets. 

Il y a trois semaines, il est venu chez moi et je lui ai dit à quel point je le trouvais contrôlant. Je lui ai même qu’il était un père castrateur. Il me répondait : 'C’est comme ça'. Je suis fille unique. Quand j'étais plus jeune, il n’était pas comme ça. Il me laissait libre de mes mouvements. Mais j'ai remarqué que depuis le décès de ma mère, c'est pire. J’ai un handicap visuel, j’ai un œil qui ne voit pas du tout et l'autre qui voit à peine à 10%. Il a probablement peur. Il m'aime, mais il me surprotège. 

" Ça me plonge dans l’angoisse et la dépression "

Mon père a 72 ans. Il est né dans une famille de sept enfants. Mes grands-parents ne contrôlaient pas leurs enfants, ils les laissaient libres d’agir comme ils le voulaient. Mon père a voyagé, il est allé au Mexique quand il était adolescent. Mon père vivait sa vie. Mon rêve, c'est d'aller en France, mais il ne veut pas. Il trouve que ça n'a pas de sens. D'après moi, il a peur que je ne sache pas me débrouiller. Il m’a toujours traitée comme une enfant, au lieu de me traiter en adulte. 

Je ne peux pas prendre de décisions et faire un pas devant l’autre sans qu’il soit là et me contrôle. C’est dur pour moi. Ça me plonge dans l’angoisse et la dépression. Je pleure souvent. Je me demande si je suis la seule à vivre ça. Les pères de mes amis ne sont pas comme ça. Mes cousins et cousines voyagent et font leur vie. Je ne sais pas de quoi mon père a peur, mais il ne veut pas me laisser vivre. Est-ce dû à mon handicap visuel ? Je ne sais pas. 

" J’ai peur que ça tourne au drame "

Mes amis me disent : 'Si c'était moi, je ne ferais pas ça comme ça. Je lui parlerais'. Mais même si je lui parle, il est borné et ne veut rien savoir. Ça fait plusieurs fois que je mets le sujet de la France sur le tapis, il ne veut même pas en entendre parler. Je passe mon temps à pleurer. Je l'aime mon père, mais j’ai peur qu’une crise de folie me prenne et qu’il arrive un événement malheureux, que ça tourne au drame. J’en ai tellement assez. 

Partir en France, c’est un projet que j'ai depuis plusieurs années. Je rêve de voyager. C'est d'abord pour m'éloigner de lui et surtout pour refaire une vie nouvelle, avoir un appartement et un emploi. J’aimerais aussi visiter. Pour mon père, c’est un non catégorique. C’est déplaisant, mais c'est surtout que ça me fait de la peine et ça me fait mal. Je ne sais plus comment faire pour m’en sortir. J’ai tenté une conversation, j’ai tenté de lui exposer mon point de vue. Mais mon père me dit que mes projets n’ont pas de sens. 

Je ne sais pas pourquoi il pense comme ça. Il faut se plier à son idée à lui. C’est non, et ça reste non. C’est difficile de vivre avec un père comme ça. L'argent qu’il me donne vient d’une fiducie. Ça a été placé, c'est comme ça et ça restera comme ça. Je n’ai jamais vu ça, à 47 ans, mon père me donne de l’argent. C’est ridicule. Pour lui, me donner de l’argent, c'est un moyen de me garder sous sa coupe. Pour lui, c'est comme dire : 'Je suis le chef et tu vas te plier à mes conditions.'

J'en parle à plusieurs personnes, mais j’ai l’impression que personne ne peut vraiment me donner de solution. C’est malheureux, mais je sais que ça ne changera pas. Si je construis mon projet sans lui dire et qu’il s’en aperçoit, ça peut le mettre dans une colère épouvantable. C’est pour ça que parfois je me dis qu’il vaut mieux que j’attende son décès pour pouvoir faire ma vie. Mon père a toujours été présent dans ma vie, alors son opinion compte beaucoup pour moi. Mais à un moment donné, à 47 ans, il faut que ça s’arrête. "