Villiers-le-Bel : un procès sous tension

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avec agences , modifié à
Cinq jeunes accusés d'avoir tiré sur des policiers lors d'émeutes sont jugés depuis lundi matin.

Cinq jeunes comparaissent depuis lundi matin devant la cour d'assises du Val-d'Oise. Les accusés sont jugés pour avoir tiré sur des policiers à Villiers-le-Bel, dans le Val d'Oise, en novembre 2007, lors des émeutes qui avaient éclaté après la mort de deux adolescents, Moushin et Lakamy, tués eux dans une collision entre leur moto et une voiture de police.

Ce procès s'est ouvert dans une atmosphère tendue. De nombreux proches des accusés n'ont pas réussi à entrer dans la salle d'audience, pleine à craquer. D'où la colère de leurs avocats qui ont menacé de boycotter l'audience. Un important dispositif policier a été déployé autour du tribunal. La tension est ensuite encore montée d'un cran après l'évacuation d'un accusé.

"Et vous voulez que je sois calme ?"

La journée a en effet été marquée par l'évacuation d'un accusé, Abderhamane Kamara, 29 ans, après qu'il ait lancé des insultes depuis le box alors qu'il était interrogé par la cour. "Pourquoi étiez-vous sur les nerfs lors de votre audition?" lui a demandé la présidente Sabine Foulon après lecture d'un procès-verbal de sa garde à vue.

Kamara, qui depuis quelques minutes répondait de façon sporadique et tendue, explose: "vous venez chez moi, vous explosez ma porte, vous m'accusez de meurtre et ces fils de p... du quartier disent que c'est moi. Et vous voulez que je sois calme ?"

Deux nuits d'émeutes

Durant les deux nuits qu'avaient duré ces émeutes, une centaine de policiers avaient été blessés par des plombs et des jets de pierres et de bouteilles, un commissaire roué de coups, des bâtiments publics et des commerces détruits. Au moins 90 policiers se sont portés parties civiles.

Quatre des accusés sont jugés pour tentative de meurtre en bande organisée sur des policiers et pour détention et port d'arme prohibés. Le cinquième, qui comparaît libre, sera jugé pour complicité, soupçonné d'avoir fourni un fusil à pompe.

Une enquête critiquée

Problème dans ce dossier : l'absence de preuves formelles. Les policiers touchés n'ont pas identifié formellement les jeunes aujourd'hui jugés. Au cours de l'enquête, plusieurs interpellations, notamment lors de la vaste descente policière qui avait mobilisé un millier d'hommes en février 2008, ont eu lieu grâce à des témoignages anonymes, obtenus avec promesse de rétribution financière.

Certains témoins ont finalement changé de version. D'autres se sont rétractés, mais parce qu'ils étaient menacés de mort.

Depuis deux ans, les accusés peuvent compter sur un collectif "Respect, Vérité, Justice", lequel organise depuis des semaines des concerts de soutien. Samedi après-midi, à l'appel de ce collectif, environ 200 personnes dont de nombreux militants d'extrême gauche ont manifesté en soutien aux cinq accusés à Pontoise, escortées par un impressionnant dispositif de policiers et de gendarmes. "Nos amis sont enfermés sans preuve depuis deux ans. Ils ont été victimes de dénonciations anonymes et rémunérées, voilà pourquoi ils sont là-bas", a dénoncé Bachir, un porte-parole du collectif.

Policiers contre jeunes de banlieue

L'enquête sur la mort de Moushin et Lakamya a, elle, été relancée en avril dernier. La chambre de l'instruction de la cour d'appel Versailles a en effet infirmé un non-lieu en faveur des policiers qui conduisaient la voiture. La justice avait ordonné un supplément d'information en vue "de la notification de la mise en examen du conducteur du chef d'homicide involontaire".