Un Quick à la sauce "communautariste"

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Europe1.fr (avec agences) , modifié à
L'initiative de Quick, qui teste la viande 100% halal dans huit restaurants, choque les politiques.

L’expérimentation du halal dans huit restaurants Quick fait grand bruit. Le maire socialiste de Roubaix, René Vandierendonck, a rencontré mercredi matin le directeur régional de Quick France et le gérant du fast-food roubaisien qui participe au test. "Ca ne me gène pas qu'il y ait une offre halal, mais ça va trop loin quand on ne propose plus que cela, cela devient discriminatoire", considère l’élu roubaisien qui menace de saisir la Halde si les sandwichs au bacon ne sont pas remis à la vente.

L’édile roubaisien affirme avoir reçu de nombreux soutiens de la communauté musulmane de sa ville. Quick a "mille fois raison de s’adapter aux besoins de la clientèle mais ils ne peuvent pas présenter une offre exclusivement halal. […] Ces consommateurs eux-mêmes n’entendent pas être stigmatisés". La ville a porté plainte jeudi pour "discrimination".

"Ce n’est qu’une affaire de bon sens"

Marine Le Pen en première ligne

Quick a lancé son expérimentation en catimini en automne dernier mais la contestation monte depuis quelques jours. La vice-présidente du FN Marine Le Pen, qui a déclenché la polémique, a jugé "inadmissible" que tous les clients "soient obligés, par l'intermédiaire de cette viande halal, de payer une taxe aux organismes islamiques de certification".

"Ce que je trouve scandaleux dans cette affaire, c’est que Quick est une entreprise qui appartient à l’Etat, puisque l’Etat en est propriétaire par l’intermédiaire de la Caisse de dépôt et des consignations" s’est emporté Marine Le Pen, jeudi, sur Europe 1 : "Cela veut dire que c’est l’Etat qui lève l’impôt islamique puisqu’à chaque fois qu’on achète de la viande halal, on verse une taxe aux organismes de certification musulman"

Le porte-parole du gouvernement Luc Chatel a fait part de ses réticences, soulignant qu'il n'était "pas un fana du communautarisme" : "je respecte les traditions, y compris alimentaires, de toutes les communautés, mais je pense que la société française, son histoire, sa culture, ça n'est pas le communautarisme".

"Il faut rester raisonnable"

Le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) Mohammed Moussaoui estime qu'il "faut rester raisonnable" dans cette affaire. "Des restaurants qui ne servent que du halal ou que du casher, ça existe depuis toujours", a-t-il rappelé. "Quick est la première chaîne de restauration à proposer du 'tout halal', mais seulement dans quelques-uns de ses établissements". Il s'étonne que les opposants à cette initiative parlent de "discrimination" : "il y a beaucoup de restaurants qui ne proposent pas de nourriture halal, et les musulmans ne crient pas pour autant à la discrimination".

"L'initiative de Quick est une démarche commerciale. Je pense qu'ils ont ouvert leurs restaurants halal dans les zones où ils ont potentiellement une clientèle nombreuse", estime-t-il. "Il est probable que dans ces quartiers, les musulmans ont souhaité qu'il y ait une offre de produits halal, mais ils n'ont sûrement pas demandé qu'on serve exclusivement du halal", ajoute-t-il, remarquant que dans beaucoup de commerces, il y a des produits halal à côté des autres, "sans problème". Il doit "prochainement rencontrer les dirigeants de Quick, à leur demande".

Proposer deux possibilités

"Marseille, ville de diversité, offre depuis cet automne à titre expérimental une restauration halal dans deux des onze enseignes Quick. Si cette démarche est parfaitement légitime, il aurait été nécessaire de maintenir également une offre non halal dans ces deux restaurants pour laisser une totale liberté de choix aux consommateurs", a souligné le maire UMP Jean-Claude Gaudin. "A ce titre, mon cabinet s'est entretenu avec la direction des deux restaurants Quick marseillais, pour les inciter à proposer les deux possibilités de restauration", a-t-il ajouté.

La concurrence des indépendants

Les 8 restaurants test, sur 350 Quick en France, ne servent plus que des hamburgers garnis de viande de bœuf venant de bêtes abattues selon le rite halal et où la dinde fumée a remplacé le bacon. Selon une porte-parole de Quick, choisir de ne proposer que des produits halal dans ces établissements n'est pas lié à des aspects religieux ou techniques mais à "une meilleure lisibilité de l'expérimentation". Quant à l'issue de cette expérience, "rien n'est exclu", pas même une offre mixte.

De nombreux fast-food indépendants proposent déjà de la viande halal, mais pour l'instant, Quick est la seule chaîne de restauration rapide à s'être lancée. Superviseur de plusieurs Quick, dont celui de Roubaix, Luc Demain a y constaté une "légère augmentation de la fréquentation" depuis qu'il est halal et affirme n'avoir pas eu de réclamations des clients. Roubaix a été choisi pour l’expérimentation du fait de l’importance de sa communauté musulmane.

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