Les boissons énergisantes "pas du tout adaptées aux besoins de l’être humain"

Les boissons énergisantes représentent un risque selon Frédéric Maton.
Les boissons énergisantes représentent un risque selon Frédéric Maton. © Reuters
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Damien Brunon , modifié à
TROIS QUESTIONS A - Frédéric Maton, médecin du sport et président de la Société Française de Nutrition du Sport.

L’INFO. L’Agence de santé a rendu un avis mardi invitant les enfants, les adolescents et les femmes enceintes à éviter de consommer des boissons énergisantes comme RedBull, Monster ou encore Burn. L’Anses pointe du doigt notamment les troubles cardio-vasculaires, psychiatriques et neurologiques provoqués par la consommation de ces boissons.

>>> Frédéric Maton est chercheur à l’IRBMS dans le Nord et président de la Société Française de Nutrition du Sport (SFNS). Il travail sur les dangers des boissons énergisantes depuis 2008 et il a participé au développement d’un site internet consacré à ces questions.

Europe1 : Que trouve-t-on dans une canette de boisson énergisante ?

Frédéric Maton : En général, dans une canette de 250mL, on trouve beaucoup de sucre : l’équivalent d’une dizaine de carrés. Ces boissons contiennent aussi des excitants : de la taurine, la quantité que l’on ingérerait naturellement en une semaine, et l’équivalent de deux expressos en caféine. La caféine, dont on connaît très bien le rôle central dans certains accidents cardio-vasculaires.

Ensuite, on trouve des vitamines B en forte concentration dans ces boissons. Parmi elles, il y en a trois dont on ne connaît pas la dangerosité réelle mais dont on sait qu’elles n’ont aucun intérêt nutritionnel. Enfin, environ une marque sur deux met du glucuronolactone dans ses canettes. C’est une molécule très mal connue qui joue un rôle dans la dégradation de sucres dans l’organisme. Le problème c’est qu’on ne sait pas ce que devient ce glucuronolactone dans l’organisme. Globalement, ces boissons ne sont pas du tout adaptées aux besoins de l’être humain.

E1 : Ces composants peu connus sont-ils dangereux ?

F.M. : On a des pistes mais aucun chercheur n’a jamais réussi à incriminer directement la taurine ou le glucoronolactone dans des pathologies. C’est très difficile à mettre en évidence car les études sont difficiles voir impossibles à réaliser. On ne peut utiliser que des études rétrospectives, et encore en France, on n'a que très peu de recul puisque l’entrée sur le marché date de 2008. L’autre problème qui se pose, c’est que les Français ne savent pas toujours qu'il est important de déclarer leurs symptômes cliniques, de déclarer leurs maux de têtes, les malaises, les tremblements, les nausées, les vomissements, les vertiges qu'ils ont quand ils consomment des boissons énergisantes. Il y a un système de nutrivigilance qui est mis en place en France,  mais il est sûrement sous-utilisé parce qu’il y a beaucoup de signes qui ne sont pas déclarés.

E1 : De manière générale, court-on un risque à boire des boissons énergisantes ?

F.M. : On se focalise trop souvent sur les substances qui sont contenues dans ces boissons. Certes, la caféine a des effets cardio-vasculaires néfastes, mais il faut surtout insister sur les contextes de consommation, ce sont eux qui peuvent être dangereux. La bibliographie est riche d’accidents cardio-vasculaires dans un contexte de consommation de boisson énergisante chez le sportif. A la SFNS, nous la contre-indiquons catégoriquement. Il ne faut surtout pas boire ce type de boisson avant, pendant et après un effort physique.

Quant à la consommation qu’en font les jeunes dans des cadres festifs, en boîte avec de l’alcool, elle est aussi problématique. Concrètement, elle peut provoquer de l'agressivité, de la confusion, de la surestimation de soi. Le consommateur perçoit par exemple nettement moins la fatigue. C’est là qu’en sortant de boîte, il prend le volant alors qu’il n’a pas conscience qu’il est fatigué et qu’il s’expose à un danger.

Passez votre souris sur les puces rouges de l'image pour en savoir plus sur la composition des boissons énergisantes :