L’enfermement des enfants en question

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Frédéric Frangeul avec AFP
Un rapport publié lundi pointe du doigt les paradoxes du système carcéral français.

La question. Quel est le sens de l'enfermement des enfants ? Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, a tenté de répondre à cette question dans son rapport annuel publié lundi dans lequel il aborde les paradoxes des politiques et dogmes carcéraux. "Notre société, depuis si longtemps, est tant préoccupée de la délinquance des jeunes que le contrôleur général a souhaité (...) se préoccuper de leur enfermement", pose en préambule le chapitre 7 du rapport de 300 pages.

Un glissement sémantique. L'expression "prévention de la récidive", sur laquelle vient de plancher une "conférence de consensus" censée inspirer une politique pénale en rupture avec le "tout carcéral", apparaissait largement dans de précédents rapports du contrôleur. Pas cette fois. Après cinq ans de visites dans les lieux de privation de liberté et un certain nombre de coups de gueule, Jean-Marie Delarue creuse là son sillon avec d'autres mots. Quand il parle des jeunes, Jean-Marie Delarue ne parle pas de "mineurs", mais plutôt d'"enfants" et de "personnalités en devenir".

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Un enfermement punitif et "naïf". La "conviction générale" peut être "que l'enfermement punitif règle les problèmes de sécurité en suspens", constate le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Or, "s'il est peu douteux qu'il les règle momentanément et visiblement par soustraction de la société de l'auteur du délit ou du crime, qu'en est-il après la sanction?", interroge Jean-Marie Delarue, en pourfendant une vision "naïve et, pour tout dire grotesque" de l'enfermement des enfants.

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Une impasse. L'enfant, selon Jean-Marie Delarue, "ne peut supporter sans dommages des relations avec autrui largement fondées sur le rapport de forces et la menace, la dissimulation et le calcul, l'amitié intéressée et la détestation sans motif". La prison, en somme.  Il est vrai, note-t-il, que beaucoup de ces jeunes arrivent dans des "lieux d'enfermement punitifs profondément désocialisés", que "certains souffrent d'inadaptations profondes, y compris sous forme de maladies mentales". "A la question de savoir s'il peut être remédié à de telles difficultés par la solution de l'enfermement, le bon sens conduit à répondre par la négative", lâche Jean-Marie Delarue.

Le dernier recours. Jean-Marie Delarue évoque également les "centres éducatifs fermés" (CEF), dont François Hollande a prévu de doubler le nombre et qui font l'objet d'une évaluation en cours à la Chancellerie, rien ne permettant de mesurer aujourd'hui leur efficacité. Pour le contrôleur, l'enfermement d'un enfant doit être "l'ultime solution", impliquant "que l'on n'y vienne jamais directement, sans avoir épuisé toutes les autres formes possibles de protection et d'apprentissage".