Karrek Ven : un témoin inattendu

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Céccile Bouanchaud et Chloé Triomphe , modifié à
Un pédopsychiatre a accusé Leonide Kameneff d'abus sexuels lors du procès de l'Ecole en bateau.

Coup de théâtre dans le procès de l'école en bateau. Un témoin inattendu a été entendu vendredi par la cour d'assises des mineurs de Paris. Un témoignage qui accable Leonide Kameneff, le fondateur de l'Ecole en bateau accusé d'avoir violé, pendant près de 30 ans, plusieurs des enfants qui avaient embarqué à bord du Karrek Ven. Le témoin, un pédopsychiatre de 57 ans, est formel : Leonide Kameneff a créé son école en bateau afin d'assouvir ses attirances envers les enfants.

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Un jeune patient de Kameneff. L'histoire de ce pédopsychiatre débute dans les années 60, quelques années avant que Leonide Kameneff ne lance son projet de l'Ecole en bateau. A l'époque, le témoin, qui préfère garder l'anonymat, est âgé de 9 ans et souffre de timidité maladive. Ses parents décident alors de l'envoyer chez Léonide Kameneff, psychothérapeute à Toulon.

"J'étais bon élève mais timide et mes parents m'avaient pris rendez-vous pour des séances chez lui environ une fois par semaine. Gentil, séduisant, attentionné, il a construit un climat de confiance dont j'avais besoin à l'époque", a confié le spécialiste devant la cour. Jusqu'au jour où les séances dégénèrent. Selon son témoignage, le pédopsychiatre aurait été victime d'abus sexuels.

Des séances qui dérapent. Après des séances de jeu, de lectures, de discussions, puis de relaxation, allongé sur un divan, "un jour, il a fermé les volets et m'a demandé de me déshabiller (...) je ne savais pas quoi en penser, c'était quelqu'un en qui j'avais entièrement confiance", raconte le témoin, très posé. Puis à un autre moment, l'enfant lève les yeux d'un livre et découvre Léonide Kameneff nu à son tour, en érection. "Il m'a fait m'allonger, m'a caressé et masturbé, m'a demandé de lui faire pareil et j'ai obéi".

L'enfant a réussi à convaincre ses parents d'interrompre ses séances. Il attendra l'âge de 40 ans pour se confier à eux, "honteux et "pas assez solide pour  porter plainte" avant la prescription, convaincu que les études qui l'ont mené à la pédopsychiatrie s'expliquent pas son "besoin de comprendre".

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"Une grande colère". C'est en lisant les articles sur le procès dans les médias que le pédopsychiatre, directeur d'un centre médico-psycho-pédagogique dans le sud, a décidé de venir témoigner au procès. Après lecture de son courrier adressé en début de semaine à un avocat des parties civiles, le président de la cour d'assises des mineurs de Paris a accepté d'entendre son témoignage sur des accusations aujourd'hui prescrites.

"La volonté de pouvoir avoir à disposition des enfants" :

 

Calme, il exprime "sa grande colère" vis-à-vis de Kameneff, aujourd'hui âgé de 76 ans et jugé jusqu'au 22 mars. "Je pense que c'est important vu ce qui m'est arrivé de pouvoir éclairer la cour sur ce qui s'est passé bien avant l'École en bateau et qui montre que l'association n'était pas qu'un projet pédagogique ou éducatif", estime-t-il à la barre. Selon lui, ce projet n'était seulement qu'un prétexte pour couvrir les dérives pédophiles de Léonide Kameneff.

Une école pour cacher ses pratiques ? "Il y avait aussi la volonté de pouvoir avoir à disposition des enfants, je pense que ce type de relation qu'il avait besoin d'avoir avec les enfants occupait toute sa vie et tout s'est organisé autour de ça avec une idéologie qui permettait ensuite de le justifier", commente le pédopsychiatre. Et de conclure : "Je pense que c'est quelqu'un de très intelligent et capable d'arriver à ses fins en utilisant cette position qu'il avait auprès des enfants."

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De son côté, Léonide Kameneff a de nouveau affirmé vendredi ne pas être "pédophile", tout en reconnaissant des "caresses affectueuses" et masturbations sur des enfants à bord des voiliers.