Ce "faisceau de présomption" contre Maurice Agnelet

Me Hervé Temime a tenté de convaincre jeudi les jurés des assises d'Ille-et-Vilaine que Maurice Agnelet a tué Agnès Leroux en 1977.
Me Hervé Temime a tenté de convaincre jeudi les jurés des assises d'Ille-et-Vilaine que Maurice Agnelet a tué Agnès Leroux en 1977. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
PLAIDOIRIE - L'avocat de la famille Le Roux s'appuie sur différents éléments pour prouver la culpabilité d'Agnelet.

"Maurice Agnelet est coupable et nous savons où, quand et comment" il a tué Agnès Le Roux. Tels ont été les derniers mots de Me Temime, l'avocat de la famille d'Agnès Le Roux, jeudi matin devant les assises d'Ille-et-Vilaine, chargée de juger l'ancien avocat pour le meurtre de sa maîtresse en 1977. Alors que le corps de l'héritière d'un casino niçois n'a jamais été retrouvé et que l'accusé a toujours nié l'avoir tuée, Me Temime s'est appuyé sur neuf indices qui, selon lui, prouve qu'Agnelet est bien l'assassin.

L'argent. Agnès Le Roux était l'héritière d'un casino niçois, Le Palais de la Méditerranée. En 1977, elle vend ses parts dans l'établissement au patron du casino concurrent, Jean-Dominique Fratoni. Les trois millions de francs qu'elle reçoit sont versés sur des comptes communs, ouverts à son nom et celui de Maurice Agnelet, à Genève. Après la disparition de la jeune femme, Maurice Agnelet transfère les fonds sur un compte à son seul nom. La somme, aujourd'hui équivalente à trois millions d'euros, est toujours bloquée en Suisse. Maurice Agnelet n'a pas formellement abandonné l'idée de la récupérer : alors que la justice suisse lui a récemment donné tort, il a fait appel juste avant le début de son procès d'assises.

Son emploi du temps. Pour l'accusation, l'emploi du temps d'Agnelet aux dates présumées de la disparition est rempli de zones d'ombre. Maurice Agnelet affirme avoir passé les 27 et 28 octobre 1977 avec une autre de ses maîtresses, Françoise Lausseure, à l'hôtel de la Paix, à Genève. Puis il affirme avoir passé la nuit suivante dans un train pour Paris, où il dit s'être rendu pour une réunion de sa loge maçonnique puis avoir dormi à l'hôtel avant de rentrer à Nice où Françoise Lausseure l'attend à l'aéroport. Cet alibi a longtemps été soutenu par Françoise Lausseure, à l'époque sa maîtresse, avant de devenir sa femme puis de divorcer. Mais cette dernière s'est rétractée en 1999. Le voyage de nuit n'est pas attesté, son agenda parisien non plus.

Le mot d'adieu d'Agnès. En mars 1978, cinq mois après la disparition d'Agnès, la police trouve chez elle une lettre d'adieu : "Désolée, mon chemin est fini... je veux que Maurice s'occupe de tout". En perquisitionnant chez Agnelet près d'un an plus tard, les enquêteurs découvrent une photocopie du mot découvert chez Agnès, à un détail près : sur le papier retrouvé chez Agnelet figure la date. Le 6 octobre (1977), le jour de la deuxième tentative de suicide d'Agnès. Pour l'accusation, Agnelet a maquillé la disparition d'Agnès en nouveau suicide.

Les livres de la Pléiade. Sur cinq livres de sa collection, Maurice Agnelet a écrit des annotations semblant avoir un lien direct avec son dessein concernant sa maîtresse. Dans les oeuvres de Rimbaud, il écrit "7 oct 77, classement des dossiers PM (Palais de la Méditerranée)". La date correspond au lendemain d'une tentative de suicide d'Agnès Le Roux. Début novembre 77, il écrit sur un livre d'Hemingway "PM reclassement, liberté". La disparition est réussie, d'où le mot "liberté", analyse l'accusation.

Le caractère de l'accusé. Au fil des témoignages recueillis pendant l'enquête et les trois procès, se dessine un Maurice Agnelet menteur, manipulateur, cupide, pervers, profiteur, cynique et obsédé par l'argent.

Le comportement d'Agnelet. Après la tentative de suicide d'Agnès, l'amant ne montre guère de compassion alors qu'elle est folle amoureuse de lui. A sa disparition, Agnelet est le seul proche d'Agnès à ne pas chercher à prendre de ses nouvelles. A Jean-Charles, son frère qui s'inquiète de ne pas avoir Agnès au téléphone après le week-end de la Toussaint, Agnelet répond : "Je ne peux pas dire que j'ai des nouvelles, je ne peux pas dire que je n'en ai pas. Elle est allée se mettre au vert, elle a pris le large, ne t'inquiète pas".

Les enregistrements. Maurice Agnelet avait pris l'habitude d'enregistrer toutes ses conversations. Mais les enquêteurs n'ont retrouvé aucun élément sonore concernant la dernière rencontre qu'il dit avoir eue à son cabinet avec Agnès.

Le témoignage de Guillaume Agnelet. Le fils de l'accusé affirme que son père a tué Agnès Le Roux. Il dit avoir reçu les confidences de ses deux parents. Interrogé par la cour lundi, Guillaume Agnelet a donné des détails : Agnelet aurait tiré une balle dans la tête d'Agnès, alors qu'ils faisaient du camping sauvage en Italie. Il aurait ensuite laissé le corps dans une forêt et abandonné la voiture de la jeune femme sur un parking.

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