Burqa : la loi sera-t-elle applicable ?

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Fannie Rascle (avec Guillaume Biet) , modifié à
L’exécutif est déterminé à mettre en place une interdiction totale. Mais la loi fixe des limites.

Lors du conseil des ministres mercredi, Nicolas Sarkozy s'est prononcé pour une loi d'interdiction du port du voile intégral qui soit totale ou "générale", c’est-à-dire qui englobe l’ensemble de l’espace public et pas seulement certains espaces publics bien délimités.

Ce texte pourra-t-il exister en France ?Fin mars, le Conseil d’Etat avait prévenu qu'une interdiction générale et absolue de la burqa "ne pourrait trouver aucun fondement juridique incontestable". La plus haute juridiction administrative avait à l’inverse estimé que l'obligation de maintenir le visage à découvert pouvait être justifiée par des exigences de sécurité ou la lutte contre la fraude "soit dans certains lieux, soit pour effectuer certaines démarches".

"Respecter la Constitution est un devoir"

Quels sont les recours possibles ? Le gouvernement s’expose ainsi à une censure du Conseil constitutionnel après le vote du texte. Le gouvernement est "prêt à prendre des risques juridiques", a d’ores et déjà prévenu le Premier ministre François Fillon qui propose de faire "évoluer la jurisprudence du Conseil constitutionnel". "Respecter la Constitution est un devoir", rappelle de son côté le constitutionnaliste Dominique Rousseau.

Et au niveau européen ? Au-delà, une interdiction totale est "incompatible avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme" et probablement aussi la législation de l'UE contre les discriminations, a fait savoir mercredi l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch. Mais là aussi, François Fillon a proposé de faire "évoluer la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme".

Une amende, une peine de prison ?

La loi pourra-t-elle être appliquée ? Dans l’islam, on ne touche pas une femme qui porte le voile intégral puisqu’a fortiori on ne la regarde pas. "Très concrètement pour un fonctionnaire de police sur la voie publique, ça va être quelque fois compliqué d’aller dans certains quartiers demander à une dame d’enlever sa burqa", a d’ores et déjà prévenu Nicolas Comte, le secrétaire général d’Unité Police-SGP, le principal syndicat de gardiens de la paix, interrogé sur Europe 1. "Parce que si on constate une infraction, il faut qu’on la fasse cesser", a-t-il rappelé. Autre limite : que se passera-t-il dans "certains beaux quartiers de Paris avec certaines princesses venues du Moyen-Orient et entièrement voilées" ? s’interroge le syndicaliste.

Et les sanctions ? En Belgique, la loi qui vient d’être votée prévoit une amende de 82,50 à 137,50 euros et/ou une peine de prison d’un à sept jours, précise le journal Le Soir. En France, Jean-François Copé, le chef de file des députés UMP, avait parlé de 750 euros d’amende.
Mais Nicolas Comte s’interroge : s’il s’agit d’un délit, les policiers devront-ils "interpeller les personnes qui ont la burqa" ?