"Aujourd'hui, nous maltraitons Vincent Lambert"

  • Copié
, modifié à
INTERVIEW E1- Eric Kariger, chef du service de médecine palliative du CHU de Reims où est hospitalisé Vincent Lambert.

"Oui, on comprend la décision". C'est par ces mots que Eric Kariger, chef du service de médecine palliative du CHU de Reims où est hospitalisé Vincent Lambert, a commenté la décision du juge des référés qui a décidé jeudi de ne pas trancher sur le cas Vincent Lambert. Invité d'Europe 1 soir, le médecin a expliqué comprendre la décision car "le cas de Vincent Lambert renvoie à des questions juridiques, éthiques et humaines extrêmement complexes. Et comme on le fait souvent en médecine, les juges vont se mettre à plusieurs pour apporter les réponses à toutes ces questions". En effet, il revient maintenant à une formation collégiale du Conseil d'Etat de décider s'il faut arrêter de maintenir en vie le jeune homme.

"J'ai confiance en la médecine et en les juges". Eric Kariger a souligné ne pas avoir de problème à voir un ou des juges prendre la décision du maintient en vie ou nom de Vincent Lambert. "Les médecins ne sont pas au dessus du droit. Tous les jours, nous engageons notre responsabilité civile, pénale et disciplinaires à travers les décisions que nous prenons. Nous allons donc laisser la justice décider et puis il sera temps de réagir ensuite", a-t-il estimé, ajoutant qu'il avait "confiance en la médecine et en les juges". "Mais lorsque l'on prend la décision de ne pas maintenir un patient en vie on le fait avant tout dans l'intérêt du patient", a-t-il tenu à souligner. "Il faut arrêter avec ce fantasme collectif. On ne laisse pas un patient mourir de faim ou de soif. On le fait avec la plus grande humanité".

"Vincent Lambert est présent dans mes pensées". La décision qui doit être prise, la semaine prochaine, par le Conseil d'Etat s'appuie sur deux piliers majeurs : "c'est le droit du patient et respecter la volonté du malade, qui avait exprimé des volontés de ne pas être maintenu en vie dans des circonstances de grande dépendance", rappelle le médecin. "Et puis, c'est aussi une situation qui nous renvoie au corps d'un patient qui tous les jours souffre", ajoute-t-il. "Ce qui m'apaise un peu, c'est qu'il est fort probable qu'il n'a pas conscience de son corps". Eric Kariger a confié à Nicolas Poincaré, n'avoir jamais connu de situation aussi difficile dans sa carrière. "Vincent Lambert est présent dans mes pensées du matin au soir", a-t-il dit, estimant "qu'aujourd'hui nous maltraitons Vincent Lambert en le laissant dans cet état. Nous ne le respectons pas dans son humanité, dans sa dignité et dans son autonomie puisqu'il avait largement revendiqué son souhait de refuser une telle vie".

sur le même sujet, sujet,

INFO - Le Conseil d’État remet le sort de Vincent Lambert à un collège de juge

ENQUÊTE E1 - Dans la chambre de Vincent Lambert

INFO E1 - Le cas Lambert les a fait réfléchir

INFO - Le CHU dépose aussi un recours

ZOOM - Comment améliorer la loi sur la fin de vie ?

INFO - La mère veut "retrouver la paix familiale"