Que faire quand on est victime de violences gynécologiques ?

Il est possible de signaler un praticien qui se serait mal comporté.
Il est possible de signaler un praticien qui se serait mal comporté. © GUILLAUME SOUVANT / AFP
  • Copié
, modifié à
Un rapport publié vendredi recense six types de faits sexistes durant le suivi gynécologique et obstétrical. Pour y faire face, il existe plusieurs possibilités.

Ce peut être un acte brutal pendant un examen gynécologique comme une épisiotomie non annoncée, un refus de poser un stérilet ou une remarque déplacée sur son épilation. Au quotidien, les actes sexistes et/ou violents lors du suivi gynécologique et obstétrical ne sont "pas des faits isolés", conclut un rapport du Haut conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes (HCE), publié aujourd'hui. Pourtant, si une prise de conscience commence à se faire, elle est loin d'être complète. D'abord parce que nombre de femmes n'identifient pas toujours qu'elles sont elles-mêmes victimes de ces actes sexistes. Ensuite, parce que beaucoup ne savent pas comment réagir.

Comment savoir qu'un praticien va trop loin ?

Non prise en compte de la gêne. Le HCE a distingué dans son rapport six types distincts d'actes sexistes. D'abord, la non prise en compte de la gêne d'une patiente. Un gynécologue qui réplique à une femme se plaignant de douleur lors de la consultation qu'elle est simplement "trop douillette" par exemple, ou qui exige d'une patiente qu'elle se déshabille totalement alors que ce n'est en rien obligatoire pour un examen de routine, n'est pas dans son droit. "Prenons le cas d'une jeune fille de 16 ans qui vient pour la première fois voir un gynécologue pour une contraception", explique Danielle Bousquet, présidente du HCE, sur Europe 1. "Il peut arriver qu'on lui demande de se mettre nue, allongée sur la table gynécologique, les jambes écartées et le vagin à portée de vue, alors que ce n'est pas nécessaire."

Jugements. On trouve aussi le jugement sur la sexualité des patientes, leur poids ou leur désir d'enfant. Le HCE reproduit ainsi dans son rapport certains témoignages édifiants, comme cette jeune femme qui s'est entendue dire que "la meilleure contraception, c'est de fermer les cuisses", une autre qu'à 28 ans elle "devait plutôt penser à un enfant" et non à se faire poser un stérilet. Quant aux remarques sur le poids, elles ont été dénoncées à plusieurs reprises par le collectif "Gras Politique", qui combat la grossophobie sous toutes ses formes, notamment médicale. L'une de ses fondatrices, Daria Marx, a ainsi raconté avoir rencontré un gynécologue qui, sans même l'ausculter, lui a certifié qu'elle n'aurait jamais d'enfant car elle était trop grosse.

Injures sexistes et actes sans consentement. Le HCE dénonce aussi les injures sexistes de certains médecins. Les actes exercés sans recueillir le consentement de la patiente composent une quatrième catégorie de violence. On y trouve notamment l'épisiotomie, cette pratique qui consiste à inciser le périnée pendant l'accouchement pour laisser passer le bébé. Parfois, l'acte chirurgical n'est pas annoncé à la patiente, voire pratiqué alors qu'elle l'a expressément refusé.

Refus des actes et violences sexuelles. Viennent aussi les refus d'actes. Certains gynécologues s'opposent par exemple à la pose d'un stérilet au seul motif que les patientes sont nullipares (c'est-à-dire qu'elles n'ont jamais eu d'enfants) et ce, alors qu'il n'existe pas de contre-indication, selon la Haute autorité de Santé. Enfin, le HCE pointe des violences sexuelles : harcèlement, agressions sexuelles, viols, etc. Et certains actes pratiqués sans consentement peuvent s'apparenter à des violences sexuelles. "Un toucher vaginal sans consentement, c'est un viol", rappelle ainsi Danielle Bousquet.

Comment réagir en cas d'actes sexistes ?

Porter plainte ou signaler les mauvais comportements. Certaines de ces violences sont pénalement répréhensibles : c'est le cas des violences sexuelles, mais aussi "de l'entrave à l'avortement, qui est un délit", rappelle sur Europe 1 Margaux Collet, co-rédactrice du rapport du HCE.

Même lorsqu'il n'est pas possible de porter plainte, cela ne signifie pas qu'une femme victime de violence soit sans solution. Ainsi, un mauvais comportement tel que ceux mentionné ci-dessus peut faire l'objet d'un signalement. Dans le cas d'un avortement mal pris en charge par exemple, une patiente peut écrire à l'Agence Régionale de Santé (ARS). N'importe qui peut également porter plainte auprès du conseil national de l'Ordre des médecins.

Et pour ne pas entreprendre de démarche seule, ce qui peut se révéler périlleux, des associations de patients et d'usagers se sont montées pour venir en aide aux femmes, comme le CIANE, collectif interassociatif autour de la naissance.

Des listes de praticiens "safe". En cas de violences gynécologiques, il convient bien sûr de ne pas retourner chez le praticien incriminé. Des initiatives ont vu le jour pour lister des médecins "safe", c'est-à-dire reconnus par les patientes comme ayant des pratiques respectueuses. Le collectif "Gras Politique" de Daria Marx a établi une liste de soignants (pas uniquement des gynécologues) au comportement "éthique et non grossophobe", tandis que le site Gyn&Co recense des médecins féministes. Du côté du HCE, on conseille désormais aux pouvoirs publics de prendre le problème à bras le corps en misant beaucoup sur la prévention. Celle des femmes, afin qu'elles connaissent mieux leurs droits. Et celles des professionnels de santé, qui doivent revoir leurs pratiques.