L'entrée de Simone Veil au Panthéon "n'est pas à l'ordre du jour"

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Aurélie Dupuy , modifié à
Deborah et Valentine Veil, petites-filles de Simone Veil, ont évoqué sur Europe 1 lundi leur grand-mère disparue vendredi. Avec force et émotion.
INTERVIEW

Deborah et Valentine Veil sont les petites-filles de Simone Veil. Trois jours après le décès à 89 ans de leur grand-mère Simone Veil, grande dame pour la France, les deux sœurs de 30 et 23 ans étaient les invitées de la matinale d'Europe 1 lundi pour en donner un portrait fort et émouvant.

"On la partage avec les Français". Depuis vendredi, la presse est revenue sur l'admirable parcours de l'ex-ministre, une femme qui a énormément marqué la France. "Le plus surprenant c’est que les gens pensent la même chose que nous. On la partage avec les Français. On a toujours su que ce n’était pas uniquement notre grand-mère et qu’elle appartenait à tous les Français", souligne Deborah Veil, appuyée par sa sœur Valentine : "Depuis la parution de la presse vendredi, on s’en rend évidemment encore plus compte. C’est évidemment très émouvant." De celle qu'elles appelaient grand-mère, la première retient "sa bienveillance, sa liberté et son intransigeance", quand sa sœur choisit les mots de "courage, détermination et pudeur".

"Ma grand-mère n’était pas impressionnante, Simone Veil oui". En 2004, Deborah l’avait accompagnée à Auschwitz pour la 60 ans de la libération des camps. "Je suis très heureuse d’avoir fait ce voyage avec elle, d’avoir partagé ça avec elle. C’était il y a un peu plus de 12 ans. Quand on va à Auschwitz, on ne se rend pas forcément compte même en présence d’un rescapé, de ce que ça a pu être. J’ai ressenti un endroit très aseptisé. Quand elle nous a montrés où elle avait dormi, été, cette transmission-là était très importante." Ce passé n'était pas aisé à aborder. Simone Veil en a d'ailleurs parlé tard, même au sein de sa famille. "C'était toujours un peu compliqué pour moi de poser ce genre de questions", souligne Valentine. "J’ai la chance d’avoir beaucoup de frères et sœurs plus âgés que moi et un père super qui m’a beaucoup parlé de sa mère. Ma grand-mère n’était pas impressionnante, Simone Veil oui". 

"Une peur de décevoir". "J’ai toujours eu conscience qu’elle était un peu en dehors du commun. Quand on est enfant, c’est particulier, parce que les enfants se fichent un peu de ces choses-là. C’est plus à travers le regarde des professeurs et en grandissant (…) quand on a partagé du temps toutes les deux, l’attention de la rue entière sur vous, m’a fait me dire qu’il se passe quelque chose avec elle. C’était une espèce de fascination qu’elle exerçait", ajoute Deborah. Cette fascination, les deux sœurs ne l'estimaient pas du tout écrasante mais confient qu'elle entraînait "de la fierté et une peur de décevoir".

"Quelqu'un d'assez sure de ses combats". Les deux jeunes femmes, qui se disent féministes "vigilantes sans être militantes", au vu de l'immense combat de Simone Veil pour les droits des femmes ont choisi un extrait d'une interview de leur grand-mère qui évoquait son entrée au gouvernement. On entend Simone Veil confier qu’elle avait "peur de faire une boulette" en tant que future ministre. "Au regard de la suite des événements, l’idée qu’elle ait eu peur de faire une boulette est assez amusante (...) Elle doutait, mais c’était quand même quelqu’un d’assez sûre de ses combats." On a pu dire de Simone Veil qu’elle était dure, intransigeante. Ses petites-filles en gardent plutôt de la douceur. "Elle était le produit de son histoire et de ses parents. Son père un homme autoritaire, et sa mère d’une douceur infinie", décrit Deborah Veil.

L'héritage colossal de Simone Veil a déclenché plusieurs pétitions demandant sa panthéonisation, une décision qui sera prise en accord avec famille de Simone Veil. Deborah et Valentine se sont exprimées sur la question. "Je trouve ça extrêmement touchant. Je pense simplement à titre personnel que mes grands-parents n’auraient pas été très heureux d’être séparés après 65 ans de vie commune", concluent les jeunes femmes qui estiment que le sujet "n'est pas à l'ordre du jour".