Loi Travail : la contestation en 10 dates clefs

Philippe Martinez a promis une mobilisation "énorme" pour le 14 juin.
Philippe Martinez a promis une mobilisation "énorme" pour le 14 juin. © BORIS HORVAT / AFP
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Romain David
La CGT organise mardi une nouvelle journée de mobilisation contre la loi Travail, alors que le texte arrive au Sénat. Europe 1 revient sur un bras de fer de quatre mois.

Nouveau souffle ou baroud d’honneur ? Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, a promis une mobilisation "énorme" à l’occasion d’une nouvelle journée d’opposition à la loi Travail mercredi. Des défilés sont prévus à Paris et dans une cinquantaine de villes à travers la France. Après presque quatre mois de contestation et de nombreuses grèves, la CGT entend donc démontrer que le mouvement ne s’essouffle pas. De son côté, le gouvernement table sur une réécriture libérale du projet de loi par le Sénat, pour pouvoir clamer qu'un texte de gauche a bien été adopté début mai à l’Assemblée, via le 49-3.

Retour en 10 dates sur le principal mouvement de contestation de la fin du quinquennat de François Hollande :

"Le débat va être très nourri." Le texte du projet de loi a été rendu public le 17 février. Myriam El Khomri, ministre du Travail, explique dans une interview aux Echos que son projet vise à "améliorer la compétitivité des entreprises, développer et préserver l’emploi, réduire la précarité du travail et améliorer les droits des salariés." La ministre reconnaît néanmoins que "le débat va être très nourri, car il y a un changement de philosophie important", précisant "nous [le gouvernement] prendrons nos responsabilités."

  • Février : inquiétude des syndicats et de la gauche autour de l’avant-projet

18 février. La militante féministe Caroline de Haas, ex-conseillère de Najat Vallaud-Belkacem, lance une pétition en ligne, "loi Travail : non merci !" demandant le retrait du projet. L’initiative récolte plus de 530.000 signatures en moins d’une semaine.

23 février.Une déclaration intersyndicale, cosignée par neuf syndicats (CFDT, CFE-CGC, CGT, FSU, L’Union syndicale solidaire, UNSA, UNEF, UNL, FIDL), conteste le projet "élaboré sans réelle concertation" et qui, selon ces derniers, "comporte des risques pour les salariés et les jeunes qui aspirent à accéder à un emploi". À ce stade, le plafonnement des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif est la principale pomme de discorde.

  • Mars : première mobilisation et durcissement de l’opposition

9 mars. La présentation du projet en Conseil des ministres est finalement reportée par Manuel Valls afin de négocier certains points. Des manifestations organisées dans toute la France réunissent entre 224.000 (ministère de l’Intérieur) et 500.000 personnes (Unef et FO). Dans le même temps, le "projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs" adopte un vocable plus social et devient "l’avant-projet de la loi sur les nouvelles protections pour les entreprises et les salariés". Le gouvernement procède à plusieurs modifications et ajouts ; les indemnisations prud’homales ne sont plus qu’"indicatives", la négociation autour du temps de travail devra passer par un accord collectif, un compte épargne-temps est créé, etc. La CFDT, la CFTC et la CGC-CFE estiment que ces mesures vont dans le bon sens.

24 mars. Les organisations de jeunesse appellent les lycéens à manifester pour le 17 mars. Leur appel réunit entre 60.000 et 150.000 manifestants. À Paris, plusieurs établissements bancaires sont visés par des casseurs en marge du cortège. À l’occasion de la journée de mobilisation du 24 mars, la vidéo d’un jeune homme frappé par un policier, tandis que deux autres le maintiennent au sol, fait le tour du web. Deux commissariats du Xe et du XIXe arrondissement sont caillassés.

31 mars. Une nouvelle manifestation réunit entre 390.000 et 1,2 million de personnes. Dans la capitale, un groupe d’opposants continue de tenir la place de la République après la fin du défilé et lance "Nuit Debout", une réunion pacifiste de différents collectifs qui, autour de l’opposition à la loi Travail, cristallise une grogne plus générale face aux institutions politiques et au système économique.

28 avril. Une nouvelle journée de mobilisation dégénère. Le ministère de l’Intérieur dénombre 124 personnes interpellées par les forces de l’ordre en France, une vingtaine de policiers blessés rien qu’à Paris, dont un grièvement. À Rennes, un jeune homme de vingt ans perd l’usage d’un œil après avoir été touché par un tir de flash-ball. La CGT dénonce les violences policières à travers une campagne polémique lancée sur internet dès le 16 avril.

  • Mai : passage en force du gouvernement et grèves

10 mai. Le Premier ministre tranche et utilise le dispositif de l'article 49-3 de la Constitution pour faire adopter, en première lecture, le texte dont l’Assemblée nationale a débuté l’examen une semaine plus tôt. Dans la foulée, la droite dépose une motion de censure. Frondeurs socialistes, membres du Front de gauche et écologistes échouent à déposer leur propre motion à deux voix près. Une tentative "grave", selon Manuel Valls. Le 12 mai, la motion déposée par les groupes LR et UDI est rejetée avec 246 voix, quand la majorité requise est fixée à 288. Le 17 mai, un mouvement de grève se met en place, touchant principalement les routiers, les dockers et les salariés des raffineries. La SNCF et les aéroports de Paris se mettent également en grève, mais principalement pour des raisons internes. Le 18 mai des policiers se réunissent place de la République pour dénoncer la "haine anti-flics". Un véhicule de police dans lequel se trouvait deux agents est incendié.

26 mai. Le mouvement de grève se durcit. Le 24 mai, la pénurie de carburant touche au moins 20% des stations essences sur le territoire. Le 26, une partie du personnel des 19 centrales nucléaires françaises se met en grève, engendrant une baisse de la production d’électricité. Le même jour, une nouvelle manifestation réunit entre 153.000 et 300.000 opposants dans toute la France. L’opposition se concentre désormais sur l’article 2 du projet auquel le gouvernement refuse de toucher. Cet article donne la primauté à l’accord d’entreprise sur l’accord de branche ; la CGT y voit la création d’un code du Travail par entreprise.

  • Juin : l’opposition s’essouffle

6 juin. Alors que les raffineries reprennent le travail, François Hollande estime dans une interview à La Voix du Nord qu’"il faut savoir arrêter une grève". Dans un communiqué, la CGT ne manque pas de rappeler au président l’intégralité de cette citation empruntée au communiste Maurice Thorez : "Il faut savoir arrêter une grève… dès que la satisfaction a été obtenue". Le 13 juin, le projet de loi arrive au Sénat, majoritairement à droite, où l’examen doit se poursuivre jusqu’au 24 juin.

14 juin. Alors que les grèves s’essoufflent et que le nombre de manifestants baisse à chaque mobilisation depuis la journée du 31 mars, la CGT lance à Paris une manifestation nationale et promet une mobilisation "énorme". "Il y aura 53 villes, notamment Marseille. On sera au-dessus du million, je pense", estime Philippe Martinez, leader de la CGT, sur RMC.

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