Libye : l'intervention française prolongée

Toute opération militaire de plus de quatre mois doit être débattue depuis la réforme constitutionnelle de 2008
Toute opération militaire de plus de quatre mois doit être débattue depuis la réforme constitutionnelle de 2008 © REUTERS
  • Copié
avec AFP , modifié à
François Fillon avait demandé mardi à l'Assemblée de poursuivre l'action militaire en Libye.

Sans surprise, l'Assemblée nationale a voté mardi soir la prolongation de l'intervention militaire française en Libye. 482 députés se sont prononcés pour, 27, notamment des communistes, et des écologistes contre. Le Sénat devrait entériner à son tour cette prolongation en fin d'après-midi. François Fillon avait demandé cette prolongation un peu plus tôt aux députés, quatre mois après le début des opérations lancées le 19 mars dans le cadre de la résolution 1973 de l’ONU.

Une formalité rendue obligatoire par la réforme constitutionnelle de 2008. Désormais, toute opération militaire engagée par l'exécutif doit faire l'objet d'un débat assorti d'un vote si elle n'est pas terminée au bout de quatre mois. D'autant que l'UMP et le PS considèrent l'opération contre les forces du colonel Mouammar Kadhafi légitime et devraient voter sa prolongation sans difficultés. Ce, malgré une situation sur le terrain qui semble tarder à s’éclaircir.

"La coalition doit poursuivre son effort"

"Personne ne cherche à liquider Mouammar Kadhafi. En revanche, son entêtement à continuer le combat dans ces conditions contre son propre peuple le disqualifie. Il faut qu'il s'en aille, qu'il quitte le pouvoir", a lancé le Premier ministre mardi matin sur Europe 1.

"Il faut qu'il s'en aille" :

Pour autant, François Fillon a assuré que l'"Otan ne gérera pas la Libye à la place de la Libye".

"Les forces du colonel Kadhafi sont affaiblies. L'attrition (leur épuisement) est lente, trop lente sans doute, mais elle est régulière. Les gains du Conseil national de transition (CNT) sont réels (...) C'est pour cette raison que la coalition doit poursuivre son effort", a fait valoir le 29 juin le chef d'état-major des armées, l'amiral Edouard Guillaud.

La France "peut absorber" les 160 millions d'euros

Pas débat non plus sur les bancs de l’opposition. "Aujourd'hui, ne pas poursuivre cette opération serait permettre à Kadhafi de regagner le terrain perdu", souligne Bernard Cazeneuve (PS) de la Commission de la Défense. Seuls "certains aspects de la conduite des opérations", comme la coordination au sein de l'Otan, devraient faire débat.

Car si les frappes aériennes ont considérablement réduit le potentiel militaire libyen et permis aux insurgés de ne pas être balayés, l'absence de troupes de la coalition au sol prolonge la durée des opérations. Et rallonge la facture française.

Le surcoût pour le budget de l'Etat avoisinerait déjà les 160 millions d’euros selon l'amiral Guillaud. Un chiffre confirmé par la nouvelle ministre du Budget Valérie Pécresse pour qui la France "peut absorber" cet effort.

"Se mettre autour d'une table"

Ce rendez-vous parlementaire intervient alors que Paris semble avoir changé de stratégie vis-à-vis de Tripoli. "Nous avons arrêté la main qui avait frappé et nous leur demandons de parler entre eux", a déclaré Gérard Longuet, le ministre de la Défense, dimanche soir sur BFM-TV. "Il va falloir se mettre maintenant autour d'une table", a-t-il ajouté.

L’heure est donc à la négociation même si le Quai d’Orsay se défend de tout contact direct avec Tripoli. "Il n'y a pas de négociations directes entre la France et le régime de Kadhafi, mais nous lui passons des messages, en liaison avec le CNT et nos alliés", a déclaré lundi matin Bernard Valero, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

"Ces messages sont simples et sans ambiguïté : toute solution politique passe par le retrait de Kadhafi du pouvoir et son renoncement à tout rôle politique", a-t-il conclu.