Déchéance de nationalité abandonnée : la droite menace de ne pas voter

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Aurélie Herbemont avec M.B.
MODIFICATION DE LA CONSTITUTION - L'opposition s'insurge de l'abandon probable de la déchéance de nationalité dans le projet de loi de réforme constitutionnelle.

C'est le jour J pour la réforme constitutionnelle. Le projet de loi doit être présenté mercredi en Conseil des ministres. Et la grande incertitude reste autour de la présence ou non dans le texte de la déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux nés Français. Cette mesure, promise par François Hollande au Congrès de Versailles le 16 novembre, a fortement divisé les rangs de la majorité.

La proposition pas retenue ? Mardi, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, a assuré qu'elle ne serait pas dans le projet de loi. "Je vous indique le projet de révision constitutionnelle qui sera présenté en Conseil des ministres ne retient pas cette disposition", a-t-elle déclaré à la télévision algérienne. Mais du côté de l'Elysée, on se refuse à tout commentaire. Le président de la République n'a d'ailleurs pas pris la parole une seule fois sur le sujet depuis plus d'un mois.

Casus belli pour l'opposition. Si l'abandon de la déchéance de nationalité assure le gouvernement d'éteindre tous les feux de contestation qui s'allument à sa gauche, cela risque en revanche de braquer la droite. Des élus de l'opposition, qui s'étaient dits favorables au projet de loi, menacent aujourd'hui d'en faire un casus belli. Or, l'exécutif a absolument besoin de leurs voix, une réforme constitutionnelle nécessitant l'approbation des 3/5e du Parlement.

Pas de "cadeau à François Hollande". La droite a lancé un avertissement clair : si le gouvernement ne joue pas le jeu de l'union nationale en inscrivant la déchéance de nationalité dans son texte, alors elle ne jouera pas le jeu non plus. Les députés n'ont pas très envie de "faire un cadeau à François Hollande". Sans déchéance de nationalité, assure l'un d'eux, "pas besoin de changer la Constitution".

Eviter les "querelles politiciennes". Au Sénat, où la droite est majoritaire, on imagine déjà un bras de fer avec le gouvernement. "On a pris ça pour un gage solennel du président", s'agace un sénateur furieux. "Si on rajoute la déchéance de nationalité, prévient un autre, c'est comme un droit de veto." Cependant, tous les élus de l'opposition ne penchent pas pour le jusqu'au-boutisme. Certains assurent rester "favorables" à la réforme pour éviter les "querelles politiciennes".

Remplacer la déchéance par l'indignité nationale. Pour trouver un compromis, des proches de François Hollande ont proposé de remplacer la déchéance de nationalité par une peine d'indignité nationale. Celle-ci permettrait de retirer aux personnes condamnées pour terrorisme tous leurs droits liés à leur nationalité, notamment le droit de vote, et de les priver de passeport. Pas sûr cependant que cela suffise à l'opposition, qui s'indigne : "si vous promettez à Luke Skywalker un sabre laser et que vous lui offrez un sabre de bois, que croyez-vous qu'il dira ?"