Débat de la présidentielle : Mélenchon se démarque, Macron résiste

© PATRICK KOVARIK / AFP
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Le leader de la France Insoumise a été le débatteur le plus remarqué, lundi soir, tant pour sa maîtrise des piques que pour son humour. Le fondateur d'En Marche!, d'abord éteint, s'est réveillé contre Marine Le Pen.

C'était inédit. Cinq des onze candidats à la présidentielle ont débattu ensemble, lundi soir, sur le plateau de TF1, pendant près de 3h30. Entre passes d'armes et appels du pied, Europe1.fr fait le point sur les prestations de Benoît Hamon, François Fillon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon. Si personne ne s'est imposé, ni effondré non plus, certains ont tout de même eu l'occasion de marquer des points.

Jean-Luc Mélenchon, le puncheur victorieux

Le leader de la France Insoumise est incontestablement sorti du lot, bien aidé par ses talents de tribun. Plus vivant que les autres participants, plus mobile aussi derrière son pupitre, le cofondateur du Parti de gauche a été le premier à ouvrir les hostilités, interrompant Marine Le Pen sur l'enseignement du français à l'école. C'est aussi lui qui, sur les affaires, n'a pas hésité à mettre les pieds dans le plat. "J'admire vos pudeurs de gazelle", s'est-il moqué alors que personne n'osait mettre des noms sur les candidats ayant maille à partir avec la justice. Dont acte : "Il n'y a que deux personnes concernées : François Fillon et Marine Le Pen." 

Volontiers professoral –notamment quand il s'est agi de relever les imprécisions de la présidente du Front national-, Jean-Luc Mélenchon s'est aussi chargé de l'animation, enchaînant les blagues et les punchlines façon Jean-Luc Bennahmias de ce débat (NDLR : pour ceux qui ont suivi la primaire de gauche…). "Il faut bien qu'il y ait un débat au Parti socialiste", a-t-il lancé après une altercation entre Benoît Hamon et Emmanuel Macron, provoquant un rire général sur le plateau.

Le Pen et Macron, bons chacun dans leur couloir

Ce débat était un baptême du feu pour Emmanuel Macron et Marine Le Pen, peu rompus à l'exercice. Tous les deux, dans leur créneau, ne s'en sont pas mal sortis dans l'ensemble, malgré quelques baisses de régime. Le fondateur d'En Marche!, quelque peu éteint au début du grand oral, s'est réveillé pour ne plus se rendormir lorsqu'il a été attaqué par la présidente du Front national sur le burkini. "Je n'ai pas besoin d'un ventriloque", a-t-il rétorqué avant de la renvoyer dans ses cordes. Lorsque Marine Le Pen l'a attaqué sur de potentiels conflits d'intérêts, il n'a pas hésité à lui répondre  "diffamation". Et Benoît Hamon, qui insinuait qu'il n'était pas transparent sur le financement de sa campagne, l'a aussi vu répondre coup pour coup.

Rarement déstabilisé, Emmanuel Macron a donné des gages à la droite et la gauche, s'alliant selon les circonstances à Jean-Luc Mélenchon, Benoît Hamon ou François Fillon. Mais s'est montré moins à l'aise sur les questions internationales, prêtant le flanc à sa meilleure ennemie.

Car c'est bien le fondateur d'En Marche ! que la présidente du Front national a visé en premier, cherchant à instaurer, d'ores et déjà, un duel de second tour. Très en verve, la présidente du Front national a misé sur ses sujets de prédilection : immigration, sécurité, critique de l'Union européenne. En dépit des imprécisions sur le solde migratoire ou le Brexit, Marine Le Pen s'en est bien tirée sur les affaires, déplaçant le débat sur Emmanuel Macron quand c'est bien elle qui a été convoquée par les juges dans le cadre d'une enquête sur des emplois présumés fictifs d'assistants parlementaires du FN au Parlement européen. Dans la dernière ligne droite, la présidente du Front national a même pu dérouler son argumentaire sur le terrorisme, sans être interrompue une seule fois par ses adversaires médusés.

Hamon et Fillon distancés

Benoît Hamon et François Fillon ont tous les deux tenté la même chose : réemployer les stratégies qui leur avaient permis de s'illustrer pendant les débats de leur primaire respective. Avec, à chaque fois, un même constat d'échec.

Le candidat socialiste a ainsi tenté de focaliser l'attention sur "la seule idée innovante de cette campagne, le revenu universel". En vain, aucun de ses adversaires ne désirant s'y attarder. Benoît Hamon a certes tenté de se montrer plus mordant en attaquant Emmanuel Macron, mais il n'y a guère que sa pique contre Marine Le Pen, qu'il a accusée d'être "droguée aux faits divers", qui a rencontré le succès escompté. S'il s'est parfois lancé dans des démonstrations trop complexes pour le temps imparti, le candidat a néanmoins su imposer, dans ses minutes d'introduction et de conclusion, sa vision de la société et du "futur désirable" qui l'avaient porté pendant la campagne de la primaire.

François Fillon, de son côté, misait sur l'image de candidat sérieux et crédible qui l'a propulsé en tête des participants les plus convaincants dans les sondages post-débat de la primaire de la droite. En réalité, il a surtout paru éteint, ne retrouvant sa sérénité et sa pugnacité que sur les questions économiques. Comme en témoigne son temps de parole, légèrement inférieur à celui des autres participants à la fin du grand oral, l'ancien Premier ministre a peiné à s'imposer. Même s'il a tenté de prendre les devants, assumant le fait d'avoir "pu commettre des erreurs" et de posséder "quelques défauts", il restait compliqué pour un candidat mis en examen pour détournement de fonds publics d'être audible sur les questions de moralisation et de transparence, mais aussi de maîtrise des dépenses publiques.