Cinq questions sur l’emploi des filles de Bruno Le Roux à l’Assemblée

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Une partie de la droite réclame une réaction de la justice après les révélations de TMC sur Bruno Le Roux. © CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
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R.Da. , modifié à
Le ministre de l’Intérieur a présenté sa démission après avoir employé ses deux filles à l’Assemblée nationale entre 2009 et 2016 pour un total de 24 CDD et un 55.000 euros.

Il refuse les "amalgames" avec l'affaire Fillon, mais a bien dû se retirer. Le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux a présenté sa démission mardi, au lendemain des révélations de Quotidien quant à l’emploi de ses deux filles à l’Assemblée nationale. Selon l’émission de TMC, les filles du ministre auraient cumulé à elles deux 24 CDD entre 2009 et 2016, alors que celui-ci était encore député de Seine-Saint-Denis, fonction qu’il a quittée le 6 janvier 2017 pour prendre la succession de Bernard Cazeneuve place Beauvau. Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet national financier (PNF).

Qu’est-il reproché à Bruno Le Roux ?

Selon Quotidien, Bruno Le Roux aurait fait employer ses deux filles à l’Assemblée nationale, pendant ses mandats de député. Aujourd’hui âgées de 23 et 20 ans, les deux jeunes femmes auraient respectivement effectué 14 et 10 CDD entre 2009 et 2016, dont certains comme assistantes parlementaires, pour un total de quelque 55.000 euros, soit des salaires allant de 1.500 à 3.000 euros par mois. L’aînée aurait commencé à travailler dès l’âge de 15 ans avec un contrat de 12 jours dont le cabinet de Bruno Le Roux a confirmé l'existence.

Est-ce interdit par la loi ?

Légalement, rien n’empêche un député d’employer un membre de sa famille. Un argument déjà avancé par le camp Fillon au moment des révélations du Canard enchaîné sur l’emploi de Penelope Fillon comme assistante parlementaire. Quant à l’âge des filles de Bruno Le Roux au moment de leur embauche, il est possible en France de travailler dès 14 ans, avec l’autorisation d’un représentant légal, uniquement pendant les vacances scolaires si celles-ci durent au moins 14 jours. "Les contrats ont bien évidemment été établis en respectant les âges permettant de travailler, en lien avec les services de l’Assemblée nationale", a fait savoir le cabinet de Bruno Le Roux.

Concernant les rémunérations accordées, celles-si sont laissées à la discrétion de l’élu, qui dispose d’une enveloppe mensuelle d’environ 9.500 euros pour payer ses collaborateurs. Avec une limite néanmoins : le salaire accordé à un membre de la famille ne peut pas dépasser la moitié de cette cagnotte, soit 4.700 euros brut environ.

Qu’est-ce qui pose problème alors ?

Plusieurs dates auxquelles ces contrats ont été effectués posent question. L’un de ces CDD aurait été effectué par l’aînée à l’été 2013, soit au même moment qu’un stage chez Yves Rocher à Tournai en Belgique, comme le souligne Quotidien, citant le CV en ligne de la jeune fille depuis supprimé. Toujours selon les révélations de Quotidien, un autre contrat, cette fois au nom de la benjamine, est daté du 20 avril au 20 mai 2015, alors que l’intéressée est encore scolarisée en classe préparatoire, ne bénéficiant sur cette période que de deux semaines de vacances.

Quelle est la défense de Bruno Le Roux ?

En pleine affaire Fillon, et alors que la justice enquête sur la réalité des tâches effectuées comme assistante par l’épouse du candidat de la droite, Bruno Le Roux a voulu balayer les soupçons d’emploi fictifs. "J'affirme mon honnêteté", a-t-il martelé au moment d'annoncer sa démission. "Mais ma responsabilité est aussi de préserver totalement l'action gouvernementale."

Concernant les chevauchements de dates entre certains contrats, le stage de l’aîné ou le temps scolaire pour la plus jeune, le cabinet du ministre a fait savoir que les tâches demandées ont pu être effectuées par les jeunes filles sur leur temps libre ou sous forme de télétravail. "Chaque contrat faisait l'objet de missions qui ont été honorées [...], puisque ces missions ont pu être effectuées en horaires renforcés avant et après le stage, et en travail à distance durant le stage (travail de rédaction, mise à jour de fichiers, recherches, etc.) et durant plusieurs jours supplémentaires à l'automne."

Quelles sont les réactions ?

Sommé par le Premier ministre de s’expliquer, Bruno Le Roux a reçu mardi le soutien de Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS. "La question essentielle, c’est de savoir si elles ont travaillé. [...] Pour l’instant, rien ne permet de dire que c’est un emploi fictif", a indiqué au micro de RTL le député de Paris, tout en faisant valoir l’action du ministre. Il ajoute : "Ne faisons pas démissionner les gens ou les mettre en retrait à partir d’un soupçon". Le candidat désigné par le PS pour l'élection présidentielle, Benoît Hamon, appelait pour sa part Bruno Le Roux à prendre "la décision la plus sérieuse" : quitter son poste.

Moins circonspecte, une partie de la droite réclame une réaction de la justice. "On attend de voir si le Parquet National Financier va être aussi rapide à se saisir du dossier de Bruno Le Roux qu'il le fut pour François Fillon", a tweeté le député LR Thierry Mariani. "Je constate que le PNF ne s'est toujours pas saisi quand il lui a fallu moins de 24 heures lors des révélations du Canard", a également pointé Hervé Morin, fidèle soutien UDI du Sarthois. En début d'après-midi, le PNF a indiqué avoir ouvert une enquête préliminaire sur ces emplois, comme il l'avait fait après les révélations du Canard enchaîné sur François Fillon, fin janvier.