Avec l'élection de Wauquiez, les militants LR espèrent des lendemains qui chantent

Laurent Wauquiez
Laurent Wauquiez a été longuement acclamé par ses militants, dimanche soir, après son élection à la tête des Républicains. © JACQUES DEMARTHON / AFP
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Dimanche soir, les militants présents pour acclamer la victoire de Laurent Wauquiez, fraîchement élu président des Républicains, ne doutaient pas de sa capacité à remettre la droite en ordre de marche.
REPORTAGE

Les soirées électorales s'apprécient à l'aune de plusieurs critères. L'affluence, bien sûr. Des élus, des militants, des journalistes. L'empressement mis à déboucher le champagne du buffet, aussi, constitue un bon indice de victoire ou de défaite. Et puis, injustement sous-estimée, la programmation musicale dit parfois beaucoup de ce qui se joue dans une salle emplie d'attente, puis de soulagement ou de déception selon la tournure des événements.

"L'envie" de gagner. A ce titre, la playlist de la soirée organisée par Laurent Wauquiez, dimanche soir, pour le premier tour de la présidence LR, était parlante. Les enceintes du Tripot Régnier, la salle du 15e arrondissement de Paris privatisée pour l'occasion par le favori du scrutin, ont d'abord diffusé la douce voix de Norah Jones, avant de s'enflammer avec Johnny Hallyday, incontournable en ces temps d'hommage. "L'envie", les militants et les élus rassemblés pour acclamer leur champion auvergnat l'avaient. Celle de gagner, évidemment, alors que le souvenir encore frais de la présidentielle rappelle constamment à toutes et à tous qu'il ne faut jamais crier victoire trop vite, quand bien même le match semble imperdable.

Une victoire pour "prendre son pied". Pour cela, les sympathisants ont été plus que comblés : non seulement Laurent Wauquiez l'a emporté, mais il a même écrasé la concurrence, en rassemblant 74,64% des voix dès le premier tour. Surtout, il peut se prévaloir de ce résultat alors que la participation a été bien meilleure qu'attendu, le scrutin ayant mobilisé presque 100.000 adhérents à jour de cotisation. "Cette participation, c'est le signe d'une belle victoire", résume Omar, 21 ans, président des Républicains à Sciences Po Paris. Originaire du Puy-en-Velay, ville dont Laurent Wauquiez a été maire entre 2008 et 2016, il se souvient encore voir, à l'âge de "12 ou 13 ans", son champion "passer avec sa doudoune rouge". Le grand sourire qu'il affiche s'accorde parfaitement avec les Daft Punk qui, en fond sonore, veulent "prendre leur pied" ("Get Lucky" en version originale).

" Pour une fois qu'on gagne une élection… "

Les "survivor" d'une année noire. "L'envie" de tous, c'est aussi celle de tourner la page d'une année 2017 qui a viré au cauchemar. Une année "terrible", souffle Françoise, enseignante en lettres modernes retraitée, militante à droite "depuis toujours". "Cette victoire maintenant, c'est inouï." Un militant préfère en rire, et trouver là une bonne occasion de remplir son verre du vin rouge qui a rejoint le nectar d'abricot sur le buffet après l'annonce des résultats. "Pour une fois qu'on gagne une élection…" Les enceintes crachent la bande originale de Rocky 3, "Eye of the Tiger". Le groupe américain Survivor ["Survivant"] chante le "frisson du combat", la "lutte corps à corps, droit au sommet" d'un homme qui s'appuie sur sa "volonté de survivre". Ça ne s'invente pas.

"Les militants ont pris un coup sur la carafe", admet Aurane Reihanian, président des Jeunes avec Wauquiez, qui a battu le rappel pendant toute la campagne interne pour remobiliser les troupes. "Maintenant, ils ne veulent surtout pas d'une guerre de chefs." Mais bien d'un nouveau départ marqué du sceau du rassemblement. "J'attends de Laurent Wauquiez qu'il refonde une droite forte. Il faut qu'on arrive à se réunir vraiment sur des questions de fond", estime Françoise. Elle, comme tous les autres militants présents, ne doute pas une seconde que le nouveau président LR, en dépit de sa ligne droitière, parviendra à maintenir l'unité de la droite. "Dans sa région [Auvergne-Rhône-Alpes], le centre et LR fonctionnent ensemble", fait valoir Aurane Reihanian.

"So excited" par la suite du programme. Dans une brève allocution après une entrée triomphale sous les cris "Wauquiez président", le nouveau président LR a d'ailleurs tendu les premières mains, prenant soin de marquer son "respect pour Maël [de Calan] et Florence [Portelli], qui ont eu le courage de se présenter" et ont été sèchement battus. Il a également appelé "ceux qui n'ont pas voulu s'engager dans cette campagne" à "mettre leur talent au service de notre famille". "Personne ne peut rester spectateur", a-t-il lancé. Une allusion limpide à Xavier Bertrand et Valérie Pécresse.

Estimant que "la France a besoin de droite", Laurent Wauquiez a promis de "tourner [les] pages" de la présidentielle perdue et des législatives décevantes pour "tout reconstruire". Il n'en fallait pas plus pour enflammer un public acquis à sa cause. "I'm so excited", hurlent les Pointer Sisters, tandis que les militants sont, eux aussi, visiblement "très excités" par ce nouveau départ. "On pose les bases du rassemblement", se félicite Omar, qui note que certains présents dimanche soir "n'étaient pas derrière Wauquiez il y a six mois".

"Le rassemblement a déjà été amorcé", abonde Valérie Boyer, députée des Bouches-du-Rhône, en citant notamment le ralliement de la juppéiste Virginie Calmels. "Maintenant, c'est à chacun d'assumer ses responsabilités".

Des lendemains qui chantent. Celles qui pèsent sur Laurent Wauquiez ne sont pas les moindres. Le tout nouveau président LR rencontre lundi matin Bernard Accoyer, qui assurait l'intérim. Puis, "il ira chercher tous ceux qui ne sont pas d'accord avec lui", assure-t-on dans son entourage. "Des discussions vont être ouvertes, le débat se fait avec tout le monde. Maintenant, l'objectif, c'est la famille, et toute la famille." A charge pour Laurent Wauquiez de prévoir des places pour chacun au sein du nouvel organigramme LR, qui sera dévoilé fin janvier lors d'un Conseil national. L'exercice, prompt à froisser les susceptibilités, n'est jamais aisé.

Laurent Wauquiez devra également arrêter la ligne du parti. Tout le dilemme est résumé par son équipe : "Il faut créer quelque chose sur lequel chacun peut se reconnaître. Mais sans aboutir à un truc flasque". Bref, rester cohérent sans cliver, rassembler sans se montrer tiède. Et ce, alors même que l'image du nouveau président est écornée, y compris au sein de son propre camp. Du côté des militants, l'attente est grande pour connaître, enfin, des lendemains qui chantent.