Valls face au périlleux chantier du dialogue social

© FRED DUFOUR / AFP
  • Copié
Le gouvernement va devoir trouver un compromis entre syndicats et patrons. Puis rassembler sa majorité.

L'INFO. Un risque pour Manuel Valls, une chance pour les frondeurs. Voilà en substance la teneur du prochain gros dossier sur la table du gouvernement : le projet de loi sur le dialogue social. Le Premier ministre sait, en plus, qu'il ne pourra s'appuyer sur un accord patronat-syndicats sur ce sujet. Ce qui risque de singulièrement lui compliquer la tâche, d'autant plus que sa majorité est encore traumatisée par son passage en force sur la loi Macron.

>> LIRE AUSSI - Dialogue social : le gouvernement reprend la main

Pas question pour autant pour Manuel Valls de reculer. "Toujours avec l'esprit de dialogue, mais sans trembler, avec tous les moyens que donne la Constitution, nous continuerons sans relâche à réformer", a-t-il prévenu. Après l'échec, fin janvier, de la négociation entre les partenaires sociaux, le Premier ministre a décidé de reprendre en main le dossier. Mercredi, il recevra ainsi les leaders de trois organisations patronales (Medef, CGPME, UPA) et de cinq syndicats (CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC) pour (re)lancer les consultations sur cette réforme, qu'il veut créatrice d'emplois.

• Déjà un point d'accord dans les TPE

Pour Manuel valls, il s'agit d'un exercice d'équilibriste : élaborer une réforme qui ne soit pas a minima, avec l'agrément des syndicats - tout au moins des réformistes - sans susciter un tollé patronal. Une gageure. Si un échec a déjà été essuyé en janvier dernier, une mesure semble toutefois en bonne voie : la création d'une représentation externe pour les salariés des Très petites entreprises (TPE, moins de 11 salariés). Réclamée par les syndicats, elle est approuvée par le Medef et l'UPA, mais pas par la CGPME. "Il n'y a pas de loi qui vaille, pour la CFDT, s'il n'y a pas dans les moins de 11 une représentation collective pour tous les salariés. C'est la voie de passage obligatoire pour nous", a lancé le numéro un de la CFDT Laurent Berger, lundi sur Europe 1.

• Les seuils sociaux, pomme de discorde

La grosse difficulté reste la simplification des obligations pour les entreprises de plus de 50 salariés afin de les inciter à franchir ce seuil et à embaucher. Le Medef propose une fusion de toutes les instances représentatives - Comité d'entreprise, délégués du personnel et Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) - dans un "conseil d'entreprise".

>> LIRE AUSSI - Dialogue social : c'est quoi le problème ?

Réponse de Jean-Claude Mailly, numéro un de Force ouvrière : "nous sommes contre". Pour les syndicats, pas question de toucher au CHSCT, auxquels les salariés sont très attachés. Pour Philippe Martinez, nouveau patron de la CGT, "il est fondamental de conserver les CHSCT" et de "garder les comités d'entreprise, leur droit d'alerte, leur droit d'expertise". "La fusion des instances représentatives du personnel n'a pas été possible par accord, donc elle ne sera pas possible par la loi", a d'ores et déjà prévenu Laurent Bergé. De belles discussions en perspective…

• Un nouveau 49-3 est-il possible ?

Manuel Valls l'a dit et répété : il utilisera tous les moyens à sa disposition pour réformer le pays. L'article 49-3 de la constitution n'est aucunement un tabou pour lui, et il l'a déjà prouvé. S'il ne parvient pas à  rassembler sa majorité - en particulier les députés socialistes "frondeurs", souvent sensibles aux arguments des syndicats -, le Premier ministre pourrait être tenté d'en faire à nouveau usage. Car s'il n'a le droit de dégainer "l'arme atomique" qu'une seule fois par session parlementaire, le Premier ministre espère boucler le projet de loi ce printemps pour un examen par le Parlement en session… extraordinaire en juillet. Ce qui lui permettrait donc d'user à nouveau du 49-3.