Régimes spéciaux : la hache de guerre déterrée

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Le président de la République a annoncé qu'il rendrait publique sa décision sur la réforme des régimes spéciaux le 18 septembre prochain. Dimanche, son premier ministre avait lancé le débat en affirmant que cette réforme était prête. Ouvrant aussitôt la voie à une levée de boucliers quasi-unanime des syndicats qui redoutent un passage en force du gouvernement, pressé de régler ce dossier très sensible.

La réforme des régimes spéciaux de retraite "est prête (...), elle est simple à faire, il s'agit d'aligner les régimes spéciaux sur celui de la fonction publique" : c'est avec ces mots que François Fillon, a relancé le débat très sensible sur les régimes spéciaux de retraite. Ce premier signal a été confirmé lundi dans la journée par le président de la République qui a expliqué qu'il se prononcerait sur le sujet le 18 septembre prochain. Une date que les syndicats et une partie de l'opposition n'ont pas attendue pour réagir vigoureusement à ce projet de réforme. A la fois sur le fond et la forme.

Sur la forme, les syndicats craignent que le gouvernement tente un passage en force, c'est-à-dire sans engager de vraies discussions sur le sujet avec les partenaires sociaux. Bernard Thibault, le secrétaire général de la CGT, a promis qu'il y aurait du "sport" en cas de "fait accompli". "Si le gouvernement veut passer en force,il faut s'attendre à des réactions, c'est évident" avait averti dimanche le secrétaire général de Force Ouvrière, Jean-Claude Mailly, rappelant que la question des régimes spéciaux est une des plus socialement sensibles. La CFDT a emboîté le pas lundi. François Chérèque, son secrétaire général, a prévenu qu'il y aurait un "conflit majeur" si le gouvernement tentait de "passer en force".

Mais une possibilité de négociations existe. François Chérèque s'est dit prêt "à discuter d'une évolution des régimes spéciaux de retraite, pour une raison simple : si on ne fait pas évoluer ces régimes, ils seront en faillite et les retraites des personnels ne seront pas versées". François Fillon avait expliqué de son côté : "Il n'est pas certain qu'il y ait besoin d'un texte législatif, ça ne veut pas dire pour autant qu'il n'y aura pas un débat au Parlement pour que cette réforme soit faite dans la transparence et la concertation".

Face à cette volonté d'aller vite, le premier secrétaire du Parti socialiste a lui aussi mis en garde le gouvernement contre tout risque de "précipitation". Pour François Hollande, "il faut absolument que la négociation soit la règle", privilégiant d'abord des discussions entre les partenaires sociaux avant éventuellement de légiférer. Si François Hollande s'attarde sur la méthode, Manuel Valls approuve la réforme sur le fond. "Les régimes spéciaux doivent être alignés sur le régime général" explique le député-maire d'Evry dans une interview accordée aux Echos ce lundi. Reprenant ainsi une inflexion de la ligne du PS déjà engagée par Arnaud Montebourg par exemple.

Sur le fond, et pour la CFDT, les régimes spéciaux sont "l'héritage de la reconnaissance de la pénibilité des métiers". Pour ce syndicat, le gouvernement cherche un bouc-émissaire alors que cette réforme correspond "à une économie négligeable, moins de 0,1%, et ne comblera pas le déficit du compte +retraite+ du régime général". Pour le PCF, "plutôt que de trouver les moyens de financer le seul système efficace, la retraite par répartition, le gouvernement fait diversion en pointant du doigt les régimes spéciaux" et "en désignant des bouc-émissaires".

A droite, pour Patrick Devedjian, "les esprits ont mûri" et les Français sont prêts pour une telle réforme. "Beaucoup de gens comprennent que la demande d'égalité du corps social sur les questions de retraite est une demande forte et aussi la maîtrise de la dépense sociale", a expliqué le secrétaire général de l'UMP, rejetant la possibilité d'un scénario similaire à décembre 1995, lorsqu'Alain Juppé avait tenté une réforme du même type. A l'extrême gauche, pour Olivier Besancenot, cette annonce est une "déclaration de guerre". Le porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire a estimé que le premier ministre avait sifflé "la rentrée sociale". "Derrière les régimes spéciaux, ce sont les régimes de retraite qui sont visés", a expliqué Olivier Besancenot.