"Je voulais juste que tu saches que je ne ressens pas de colère contre toi, que je ne ressens pas de haine. Je suis désolée que tu n'aies pu trouver aucune aide, aucun réconfort", écrit "Laura" dans un message sur le mémorial, constitué d'une pierre par victime. Seung-Hui Cho, un étudiant sud-coréen, a mis fin à ses jours après s'être livré lundi à la pire tuerie jamais recensée dans une université ou une école américaine. Parmi ce mémorial, au milieu des fleurs et des notes, trois messages seulement expriment de la sympathie ou de la tristesse pour le tireur, qui suivait un cursus d'anglais à Virginia Tech. "C'était un étudiant. Trente-trois personnes sont mortes", commente Chris Chabalko, 29 ans, qui juge qu'ajouter une pierre à la mémoire de Cho est un acte juste. Près d'une dizaines de funérailles étaient prévues samedi à Blacksburg et dans le reste des Etats-Unis. Au total, Cho a abattu 27 étudiants et cinq enseignants. Quelque 800 personnes se sont notamment rendues au lycée de Narrows, une petite ville ouvrière située à une cinquantaine de km de l'université, pour les funérailles de Jarrett Lane, au cours desquelles John Edwards, sénateur de Virginie, a pris la parole. Après cette cérémonie, les proches du défunt ont emprunté la piste d'athlétisme où Lane s'entraînait, pour rejoindre un petit cimetière où il a été porté en terre. A Evans, une centaine de membres de la fanfare de Virginia Tech a rendu hommage à Ryan Clark, 22 ans. Vendredi soir, la famille de Cho a rendu publique une lettre d'excuse. "Il a fait pleurer le monde. Nous vivons un cauchemar", dit un communiqué lu par la soeur de Cho. "Au nom de notre famille, nous sommes profondément désolés du désastre causé par mon frère. Il n'existe pas de mots pour exprimer notre tristesse face à la mort cette semaine de 32 personnes innocentes dans une tragédie aussi terrible, insensée. Nous avons le coeur brisé", ajoute le communiqué. "Nous n'aurions jamais pensé que mon frère était capable d'autant de violence. Il a fait pleurer le monde entier, nous vivons un cauchemar.C'est une terrible tragédie pour nous tous" a déclaré la soeur de Cho Seung Hui. De nombreuses zones d'ombre demeurent toujours dans la personnalité de Cho Seung-Hui. La chaîne américaine NBC a, en effet, reçu un colis posté par Cho Seung-Hui entre les deux fusillades. La chaîne de télévision n'a reçu les documents que mercredi parce que l'adresse ne comportait pas le bon code postal. Le colis contenant la vidéo mais aussi un long texte et des photos avait été déposé dans un bureau de poste proche de l'université lundi à 9h01, alors que deux étudiants avaient déjà été tués par balle dans une résidence universitaire, mais avant que Cho Seung-Hui abatte 30 autres personnes dans des salles de cours puis se donne la mort. Dans le texte, Cho exprime son admiration pour les jeunes auteurs du massacre du lycée de Columbine, en 1999. Dans son long monologue face à la caméra, il mêle références religieuses et expressions de dégoût face à "l'hédonisme" qui l'entoure. "Grâce à vous, je meurs comme Jésus-Christ, pour inspirer des générations de personnes faibles et sans défense", dit-il dans la vidéo diffusée mercredi par NBC. "Vous m'avez acculé et vous ne m'avez pas laissé le choix. C'est vous qui en avez décidé ainsi. Maintenant vous avez sur les mains du sang dont vous ne pourrez jamais vous laver". "Savez vous ce que c'est que d'être humilié et empalé sur la croix?", demande-t-il par ailleurs. "Votre Mercedes ne suffisait pas, espèce de morveux? Vos colliers en or ne suffisaient pas, espèce de snobs? Vos fonds d'investissement ne suffisaient pas? Votre vodka et votre cognac ne suffisaient pas? Toutes vos débauches ne suffisaient pas? Cela ne suffisait-il pas pour satisfaire vos besoins hédonistes? Vous aviez tout", dit-il encore. Un tribunal de Virginie l'avait déjà déclaré "malade mental" et présentant "un danger imminent pour lui-même et pour les autres". La tragédie a relancé le débat sur le contrôle des armes à feu aux Etats-Unis, qui ont la législation la plus permissive en ce domaine parmi les pays occidentaux. Les observateurs se demandent comment Cho, qui était connu des services de police et avait un passé psychiatrique, a pu s'acheter en toute légalité les deux revolvers utilisés dans la fusillade.