L'heure du "Travailler plus pour gagner plus" a sonné

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
L'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, une des mesures phares du programme du candidat Sarkozy à l'élection présidentielle, est entrée en vigueur dans le secteur privé ce lundi. Coûteuse pour l'Etat, qui devra compenser les cotisations non versées à la Sécurité sociale, la loi permet qu'une heure supplémentaire rapporte désormais 25% de plus qu'une heure normale, y compris dans les entreprises de moins de 20 salariés qui bénéficiaient auparavant d'une dérogation.

18 millions de salariés sont concernés parce qu'ils font déjà des heures supplémentaires. Depuis ce lundi, en application d'un décret qui exonère fiscalement et socialement ces heures sup', les salariés qui travailleront au-delà de leur temps de travail régulier ne devront pas payer d'impôts ou de cotisations sociales sur ce supplément de salaire. Cette réforme, qui était l'une des promesses de campagne principales de Nicolas Sarkozy, avec le slogan "Travailler plus pour gagner plus", a fait l'objet d'un décret publié la semaine dernière au Journal officiel. Pour l'instant, le dispositif ne concerne que les salariés du privé, hors cadres qui travaillent au forfait journée. Les syndicats de fonctionnaires doivent eux se réunir mardi, pour discuter d'un projet de décret qui pourrait à son tour être publié dans les jours à venir, selon le secrétariat d'Etat à la Fonction publique.

Pour l'URSSAF, cette réforme risque de favoriser certaines fraudes. Au lieu de déclarer des primes soumises à cotisations sociales, certains employeurs pourraient être tentés de les transformer en heures supplémentaires pour profiter de la défiscalisation. Un système plus avantageux mais parfaitement illégal. Et pour lequel les inspecteurs de l'URSSAF vont vite être démunis car cette exonération des heures supplémentaires s'adresse en priorité aux PME, les plus nombreuses et les plus difficiles à contrôler.

Du côté de l'opposition, Laurent Fabius, invité d'Europe 1 lundi matin, "prévoit un énorme pataquès" avec l'application de cette réforme. L'ancien Premier ministre fait observer que "par définition, encourager les heures supplémentaires, défiscaliser, cela ne résout en rien les problèmes des centaines de milliers de gens qui n'ont pas d'emploi". Pour François Hollande, le premier secrétaire du Parti socialiste, "cette mesure peut avoir des effets pervers, si l'on fait travailler plus ceux qui sont dans l'emploi et que c'est au détriment de l'embauche, l'économie française ni gagnera pas".

La mesure reste coûteuse à appliquer pour l'Etat, qui devra compenser les cotisations non versées à la Sécurité sociale, pour un montant estimé à plus de 5 milliards d'euros. En effet, les entreprises sont incitées à recourir aux heures supplémentaires par une réduction forfaitaire de cotisations sociales (0,50 euro par heure supplémentaire, 1,50 euro dans les entreprises de moins de 20 salariés). Cette aide en faveur de l'allongement du temps de travail se cumule par ailleurs aux aides versées au titre de la réduction du temps travail, les 35 heures. Le tout fait exploser le poids des allègements de cotisations sociales au bénéfice des entreprises à environ une trentaine de milliards d'euros dans le budget de l'Etat en 2008.