Jean-Marie Villemin ne sera pas réhabilité

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
La cour d'appel de Paris a rejeté la demande de réhabilitation de Jean-Marie Villemin, condamné en 1993 à cinq ans de prison dont quatre ans ferme pour avoir tué en 1985 le meurtrier présumé de son fils Grégory, Bernard Laroche. Ce crime jamais formellement résolu, un des plus médiatisés de l'après-guerre, a connu de multiples rebondissements et ses protagonistes s'affrontent sans relâche devant les tribunaux et dans les médias.

Les trois magistrats de la cour d'appel n'ont pas suivi le parquet général, qui avait dit la semaine dernière à l'audience qu'il ne "s'opposait pas" à la réhabilitation de Jean-Marie Villemin. Les attendus de l'arrêt n'ont pas été rendus publics dans l'immédiat. Très rarement prononcée par la justice, cette mesure permet d'effacer une condamnation du casier judiciaire et d'interdire qu'il en soit fait état. Pour le père de Grégory, absent des audiences de Paris, il s'agissait d'obtenir une réparation symbolique de la justice, dont il estime être avant tout une victime. "C'est un parfait honnête homme devenu criminel à la suite de circonstances particulières. C'est un combat pour la dignité", avait dit la semaine dernière Me Thierry Moser, son avocat, aux journalistes. Me Moser a fait connaître mardi sa "rude déception" devant l'arrêt de la cour d'appel et il a indiqué qu'il allait étudier un pourvoi en cassation. Pour lui, les magistrats de la cour se sont peut-être laissés "impressionner par l'exceptionnel retentissement médiatique de ce dossier". Me Gérard Welzer, avocat de la famille Laroche, qui craignait qu'une décision favorable soit comprise comme une justification du crime, a exprimé sa satisfaction. "Je suis très content que la justice ne se soit pas laissée instrumentaliser", a-t-il dit. Le parquet général estimait que les conditions de la réhabilitation étaient remplies, car la condamnation est ancienne, le condamné a indemnisé les victimes et payé les frais de justice et a montré une réinsertion professionnelle et sociale, sans subir de nouvelle condamnation. Les Villemin ont quitté les Vosges et vivent en région parisienne. Cette procédure ravive les blessures de cette affaire qui a suscité en son temps une remise en cause du système judiciaire, des réformes partielles, et un affrontement entre les médias et les journalistes, séparés en deux camps. L'affaire, qui n'est pas encore prescrite, vient de faire l'objet d'un téléfilm à succès, diffusé à l'automne 2006. Grégory Villemin, âgé de quatre ans, avait été retrouvé mort, pieds et mains liés, le 16 octobre 1984 dans la Vologne, une rivière proche de son domicile de Lépange-sur-Vologne (Vosges). Un juge d'instruction, Jean-Michel Lambert, avait d'abord inculpé Bernard Laroche, oncle de la victime, mis en cause par le témoignage de sa belle-soeur. Bernard Laroche avait été libéré en février 1985, après la rétractation du témoin et des annulations de procédure entraînant le retrait des éléments matériels. Les soupçons du magistrat s'étaient alors portés sur Christine Villemin, mère de la victime, alors enceinte. Peu après l'hospitalisation de cette dernière, Jean-Marie Villemin avait abattu Bernard Laroche à coups de fusil le 29 mars 1985. Christine Villemin avait été inculpée et incarcérée en 1985 par le même juge d'instruction pour l'assassinat de son fils, mais a finalement bénéficié d'un non-lieu en 1993 pour "absence de charges". La même décision relevait que des charges "très sérieuses" subsistaient sur Bernard Laroche. En raison des dysfonctionnements de l'enquête, l'Etat français a ensuite été déclaré responsable d'une "faute lourde du service public de la justice" et a dû indemniser les Laroche comme les Villemin.