Une messe a été dite en l'honneur du cardinal Lustiger lundi soir en la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, où ses obsèques seront célébrées vendredi par Mgr André Vingt-Trois, qui fut son plus proche collaborateur avant de lui succéder à la tête du diocèse de Paris. Une chapelle ardente sera mise en place jeudi. Jean-Marie Lustiger, emporté par un cancer à 80 ans dimanche, était considéré comme un "traditionaliste moderne" et comptait parmi les proches de l'ancien pape Jean Paul II. Au début des années 1990, c'est sur lui que le souverain pontife s'était appuyé lorsqu'il décida de faire acte de repentance pour des fautes de l'Eglise envers les juifs. Né Aaron Lustiger le 17 septembre 1926 de parents réfugiés polonais commerçants à Paris, il s'était converti au catholicisme durant la Seconde Guerre mondiale, prenant le prénom de Jean-Marie. Sa mère fut déportée à Auschwitz, où elle mourut en 1943. Ordonné prêtre en 1954, il fut nommé évêque d'Orléans en 1979 et archevêque de Paris en 1981. "Son souci premier était de montrer que le christianisme a toujours sa place dans cette société indifférente à la foi", résume Mgr Vingt-Trois dans un entretien au magazine Pèlerin. "Le monde chrétien a perdu l'une de ses plus grandes personnalités, la France a perdu une grande figure morale et spirituelle et le monde juif a perdu l'un de ses amis les plus chers", estime dans un communiqué le secrétaire général adjoint du Congrès juif mondial, Maram Stern. En janvier 2005, le cardinal Lustiger fut le premier à s'exprimer devant l'assemblée plénière du CJM. "Jean-Marie Lustiger a été une figure historique des relations entre juifs et catholiques, non seulement en France mais dans le monde", salue le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif). "Nous savons que ce qu'il a planté continuera de se développer." Mgr Lustiger "a toujours été pour nous, musulmans de France, un homme d'une bienveillance éclairée et d'un conseil sage et prudent", écrit pour sa part le recteur de la Mosquée de Paris et président du Conseil français du culte musulman (CFCM). "Il sut trouver des mots forts pour l'accueil de l'étranger et le combat pour la tolérance", estime Dalil Boubakeur. Au nom de la Fédération protestante de France, le pasteur Gill Daudé salue une "forte personnalité, exigeante et dérangeante (qui) a porté haut et fort l'identité et la visibilité de son Église dans une société en pleine mutation et en proie aux doutes". De ses vacances estivales du New Hampshire, Nicolas Sarkozy a rendu hommage au cardinal disparu, saluant une personnalité "à l'image des épreuves que la vie lui avait fait traverser et qui furent d'abord celles de l'Europe au cours du XXe siècle". De son côté, François Fillon salue la mémoire d'un homme d'église qui, "porté par son histoire et ses convictions, a considérablement enrichi le dialogue entre les religions". "Dans ses relations avec les pouvoirs publics, enfin, le cardinal Lustiger a su faire vivre une laïcité ouverte et respectueuse", note le Premier ministre. Secrétaire national du Parti socialiste chargé des questions de laïcité, Jean Glavany "salue la mémoire d'un homme de paix, de dialogue et d'échange entre les cultures, d'un sage". Pour le Parti communiste, le catholicisme français perd certes "une grande figure respectée" mais, déplore le PCF, "comme Jean Paul II", Jean-Marie Lustiger n'aura pas été "l'homme d'une évolution positive sur les questions liées à la sexualité et au sacerdoce des prêtres" et fit de son combat pour l'école privée "une grande bataille idéologique". Le pape Benoît XVI a fait par de sa "vive émotion" et salue la disparition d'une "grande figure de l'Eglise en France", dans un télégramme adressé à l'archevêque de Paris Mgr André Vingt-Trois.