Hollande et Society : une stratégie média tous azimuts

  • Copié
Louis Hausalter , modifié à
COUPS DE COM' - Le chef de l'Etat diversifie ses interventions dans la presse. Pour renforcer sa stature tout en cultivant la proximité.

"La grande confession" de François Hollande, c'est la couverture du deuxième numéro du magazine Society. L'équipe de ce nouveau-né de la presse française, au ton marqué jeune et "bobo", a pu interviewer le président pendant deux heures à l'Elysée, séance photo comprise. Pas de gros scoop dans cet entretien-fleuve, mais quelques confidences. Par exemple sur "la mort" qui "habite la fonction présidentielle", dixit Hollande, qui affirme "maîtriser ses émotions au nom de la raison d'État". Mais "je peux avoir une colère intérieure, je peux bouillir", prévient-il. L'entretien brasse tous les sujets : le FN, l'économie, Macron, Poutine, la pluie…

"Ça s'est goupillé assez facilement". A l'origine de cette interview, un déjeuner en octobre dernier, à l'Elysée, entre François Hollande et l'équipe de So Press, la société qui édite notamment le magazine So Foot. "Ça s'est goupillé assez facilement", explique à Europe 1 Franck Annese, le patron de So Press. "Je pense qu'il a accepté d'abord parce qu'il aime bien So Foot et l'idée qu'on lance un nouveau magazine. Et bien sûr, c'est intéressant pour lui de communiquer dans un média nouveau, qui a le vent en poupe". Franck Annese rappelle que François Hollande est "un grand fan de presse". Ce que ne démentiront pas ses proches, qui décrivent régulièrement un président boulimique de journaux.

A l'Elysée, on confirme l'intérêt de François Hollande pour les créateurs de So Foot. "Le président a accepté tout de suite parce qu'il aime le ton et le contenu des publications de ce groupe", affirme un conseiller. Mais si François Hollande a joué le jeu, c'est aussi en raison du "format long, qui permet d'argumenter et de détailler les choses", ajoute-t-on. "Surtout, ce type de format permet de mêler le solennel à un ton plus léger".

De Mon Quotidien à Challenges, le grand écart. Cet entretien s'inscrit dans une séquence particulière. Depuis le début de l'année, François Hollande multiplie les interviews à la presse écrite, sans craindre le grand écart. Le 22 janvier, il se rendait dans les locaux de Mon Quotidien, un journal destiné aux 10-14 ans (photo). Début mars, il recevait à l'Elysée des lecteurs du Parisien. La semaine dernière, il s'adressait aux milieux économiques dans le magazine Challenges.

Hollande Mon Quotidien AFP

© REMY DE LA MAUVINIERE / POOL / AFP

Un journal, un public : c'est, en résumé, ce qui semble être l'objectif de ce déploiement tous azimuts. "Toute la difficulté d'un politique, et d'un président a fortiori, c'est de parler aux cibles qu'il ne touche pas habituellement", décrypte l'historien Christian Delporte, spécialiste de la communication politique. "La presse écrite, dont le public est segmenté, permet de toucher différentes catégories de Français".

Cultiver la proximité. L'autre objectif, c'est de renforcer la stature particulière que François Hollande aurait acquise après les attentats de janvier. La cote du chef de l'Etat avait alors bondi dans les sondages. "Etre président de la République, c'est aussi conserver ce qui fait sa proximité, cultiver le contact direct avec les Français", explique-t-on à l'Elysée. Mais à force d'exposition médiatique et de personnalisation, n'y a-t-il pas un péril pour cette "présidentialisation" si difficilement acquise ? "Ce risque n'existe plus du tout", balaie-t-on à l'Elysée, où l'on veut croire que pour les Français, François Hollande est désormais durablement installé dans le costume de chef de l'Etat.

Miser sur la proximité et le lien particulier avec le peuple n'en reste pas moins une stratégie éprouvée, remarque Christian Delporte : "ce n'est pas d'une grande originalité, c'est même couramment employé en période électorale". Alors que son Premier ministre Manuel Valls arpente la France avant le premier tour des départementales, dimanche, François Hollande aussi fait campagne. A sa manière.

>> Dany Cohn-Bendit a consacré sa chronique matinale, vendredi matin sur Europe 1, à cet entretien du chef de l'Etat dans Society : "il parle, il s'explique, c'est déjà bien, mais il devrait aller plus loin",a-t-il  jugé :

>> LIRE AUSSI - Départementales : la gauche, victime annoncée de sa désunion

>> LIRE AUSSI - Hollande surfe sur la vague de "la France qui gagne"

>> LIRE AUSSI - Les partisans de Hollande préparent déjà 2017