Fillon, le "collaborateur" incontournable

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Fabienne Cosnay (avec Aurélie Herbemont et Yaël Goosz ) , modifié à
Le Premier ministre n’hésite plus à afficher ses différences avec le chef de l’Etat.

Il y a trois ans, il était réduit au rang de simple "collaborateur". Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy craint que son Premier ministre ne lui fasse de l’ombre. Et ne sait pas quoi faire dans les prochaines semaines. Le garder sous contrôle jusqu’à la fin du quinquennat ? Difficile puisque le chef de l’Etat a lui-même annoncé un grand remaniement au mois d’octobre. S’en séparer ? François Fillon pourrait en profiter pour prendre les rênes de l’UMP, en lieu et place de Xavier Bertrand.

La majorité l'apprécie

Une chose est sûre : leurs rapports de force ont changé. Le Premier ministre a la cote auprès de la base UMP et des parlementaires. Son tempérament calme et pondéré plait à la majorité. Même l’opposition y va de son compliment : "Moi, je ne crois pas que (Nicolas Sarkozy) puisse facilement changer François Fillon" a estimé François Bayrou, jeudi. Et le président du MoDem d’enfoncer un peu plus le clou : "Quand un Premier ministre fait son travail, qu'il a une popularité, qu'il est estimé, reconnu, même par des gens qui ne sont pas de son avis, c'est très difficile de le changer".

Indispensable sur les retraites

Au fil des mois, François Fillon a su se rendre incontournable. Dernière preuve en date ? Nicolas Sarkozy a demandé à son Premier ministre de monter au créneau sur la réforme des retraites, alors qu’Eric Woerth est à nouveau fragilisé dans le dossier Bettencourt. Jeudi prochain, il sera l'invité de l'émission politique "A vous de juger" sur France 2, deux jours après la présentation de la réforme devant le Parlement.

Des prises de position

Aujourd’hui, François Fillon affiche sa différence avec Nicolas Sarkozy, ne cherchant plus à arrondir les angles à tout prix. Première rupture, le 16 juillet. En visite au Japon, le locataire de Matignon évoque la "rigueur" mise en oeuvre par la France. Nicolas Sarkozy, lui, s’est toujours refusé à employer le mot tabou.

Deuxième épisode, sur le style cette fois. Le 20 août, Nicolas Sarkozy convie quelques ministres pour une pré-rentrée sur le thème des déficits publics. A l’issue de la réunion, les deux hommes forts de l’exécutif partagent un long tête-à-tête. La presse ne saura rien sur le contenu de leurs échanges mais retiendra une chose : la décontraction vestimentaire affichée par le Premier ministre. François Fillon a décidé de porter un pantalon de toile écrue et une veste, non à col Mao mais un modèle nommé "La forestière", très en vogue chez les étudiants.

Distance sur la politique sécuritaire

Troisième épisode : le 24 août, alors que la majorité UMP est divisée sur la politique sécuritaire annoncée par le président à Grenoble, François Fillon improvise une réunion sur le dossier très sensible des Roms à Matignon. Et prend sans pincettes ses distances avec Nicolas Sarkozy. La "lutte contre l'immigration irrégulière" ne doit "pas être instrumentalisée de part et d'autre" précise le chef du gouvernement dans un communiqué publié à l’issue de la réunion. En montant en première ligne sur ce dossier, le Premier ministre s'éloigne de certains ténors de l'UMP. Ceux-là même qui sont encouragés par le chef de l’Etat.