Ecoutes de Sarkozy : Ayrault savait

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RÉSUME - Le Premier ministre a reconnu sur France 2 que Christiane Taubira et lui-même savaient. Mais "on n'a pas appris le contenu des écoutes".

La classe politique ne parle plus que de ça : Nicolas Sarkozy a été mis sur écoute. Mardi, majorité et opposition se sont renvoyé la balle toute la journée, sur fond de fronde des avocats. Dans la soirée, Jean-Marc Ayrault a reconnu que lui et Christiane Taubira étaient bien au courant de ces écoutes. Mais "on n'a pas appris le contenu des écoutes", a-t-il aussi précisé. Europe1.fr vous refait le film.

>> ACTE 1 - L’UMP somme Hollande de s’exprimer

jean françois copé

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"Ne vous inquiétez pas, je le surveille, je sais exactement ce qu'il fait", aurait lancé François Hollande à des parlementaires socialistes en parlant de Nicolas Sarkozy. Cette petite phrase rapportée par le Figaro Magazine a secoué la droite, qui veut désormais savoir si le président était au courant de cette mise sur écoute de son prédécesseur. "Cette situation est très grave, elle touche aux libertés publiques", a accusé Jean-François Copé. "C'est la raison pour laquelle je souhaite savoir si oui ou non le président de la République était informé de ces écoutes et qu'il le dise clairement en tant que garant des libertés publiques", a conclu le patron de l’UMP.

Le chef de l’Etat "doit à mon sens s'exprimer. (…) En tant que chef de nos institutions, il doit s'exprimer pour clarifier sa position et ramener la sérénité dans le fonctionnement de l'institution judiciaire", a abondé Luc Chatel sur RFI. "Le président de la République étant à la fois le garant de l'indépendance et du bon fonctionnement de la justice, il doit s'exprimer sur cette affaire qui est une affaire de la plus grande gravité", a renchéri Christian Jacob, patron des députés UMP, lors d'une conférence de presse.

Si le chef de l’Etat n’a, pour le moment, pas répondu à cette demande de l’opposition, il a en revanche décidé de répondre positivement à celle formulée par le bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sur, lundi sur Europe 1, rejoint par  l'Union syndicale de la magistrature. Tous deux demandent une "clarification" : "j'ai reçu ces deux lettres et j'y répondrai", a assuré François Hollande à des journalistes, en marge d'un discours à l'Elysée. Quelques instants plus tard, le président s'est dit "prêt à recevoir"les deux hommes.

>> ACTE 2 - Ayrault nie toute intervention de l’exécutif

Jean-Marc Ayrault

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En attendant la réponse éventuelle de François Hollande, les élus UMP ont d’ores et déjà reçu une réponse de son Premier ministre quant à une hypothétique intervention de l’exécutif dans cette affaire. "Il n'y a aucune immixtion de la garde des Sceaux (Christiane Taubira, ndlr), de l'exécutif, dans le déroulement des instructions judiciaires, c'est la garantie que je dois donner, que je veux donner aux citoyens", a affirmé Jean-Marc Ayrault, interrogé par des journalistes. "Il faut que la droite française s'habitue à ce que la justice fonctionne en toute indépendance. Les mœurs du passé, c'est fini", a encore taclé le chef du gouvernement. 

>> ACTE 3 - Les députés UMP demandent une commission d'enquête parlementaire

François Fillon

Plutôt discret ces derniers temps alors que les affaires se multiplient dans son camp, François Fillon a estimé que les parlementaires devaient se pencher sur la question de ces écoutes.  "Je suis favorable à une commission d'enquête parlementaire, c'est la seule manière de sortir de la confrontation des positions", a assuré le député de Paris. Les élus UMP ont ensuite demandé au Premier ministre qu’il convoque le parlement en urgence pour "s’exprimer devant la représentation nationale."  "S'il refuse de le faire cela veut dire qu'il y a des doutes importants sur le fonctionnement et sur le respect de nos institutions", a accusé Christian Jacob.

La réponse de Jean-Marc Ayrault ne s’est pas faite attendre, et c’est un fin de non-recevoir qu’il a adressée à son prédécesseur : "quand je pense que François Fillon, qui a été Premier ministre, demande une commission d'enquête sur une affaire judiciaire en cours, mais je me demande où il habite! Nous n'avons pas la même conception de la République et de l'indépendance des pouvoirs". Quant à la requête des élus UMP, la tonalité de sa réponse est la même : "demander au Parlement de s'occuper des affaires de justice, mais dans quelle République sommes-nous ?", s’est-il interrogé.

>> ACTE 4 - Ayrault reconnaît que Taubira était au courant

"Je n'avais pas l'information" que Nicolas Sarkozy et son avocat étaient écoutés, avait assuré Christiane Taubira au 20 heures de TF1, lundi soir. Mardi, le Canard Enchaîné a affirmé le contraire, ce que Jean-Marc Ayrault a confirmé un peu plus tard sur France 2. L’exécutif "n'a pas appris le contenu des écoutes" judiciaires visant Nicolas Sarkozy, mais connaissait leur existence depuis le 26 février, date de l'ouverture d'une information judiciaire, a reconnu le Premier ministre. "La garde des Sceaux a reçu une information, que j'ai eue moi-même ensuite, qu'il y avait une nouvelle information judiciaire qui avait été ouverte sur des faits extrêmement graves. C'est à cette occasion qu'on l'a appris.

Jean-Marc Ayrault a par ailleurs expliqué que les deux juges qui enquêtent depuis avril 2013 sur un éventuel financement par la Libye de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy avaient "découvert des faits nouveaux n'ayant rien à voir avec leur saisine". Ces faits nouveaux sont apparus, a dit le Premier ministre, "grâce aux écoutes (sur lesquelles) nous n'avions pas d'information ni sur le contenu ni sur leur opportunité". "Nous ne savions pas que les écoutes étaient diligentées", a-t-il insisté.

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