Droits TV de Ligue 1 : la mise au point de Canal +

  • Copié
Clémence Olivier , modifié à
Le président du Directoire du groupe Canal Plus, Maxime Saada, invité mercredi de Patrick Cohen sur Europe 1, a tenté de rassurer ses abonnés alors que la chaîne cryptée vient de perdre les droits de diffusion de la Ligue 1 pour la période 2020-2024.
INTERVIEW

C'est un coup de tonnerre pour Canal +. Diffuseur historique du football français depuis sa création en 1984, la chaîne cryptée n'a remporté mardi aucun des sept lots mis en vente par la Ligue de football professionnel (LFP) pour les droits télé de la période 2020-2024. C'est le groupe espagnol Mediapro qui a raflé la plupart des lots. Invité mercredi au micro de Patrick Cohen sur Europe 1, Maxime Saada le président du Directoire du groupe Canal Plus a cherché à rassurer ses abonnés tout en mettant en questionnant la solidité de l'offre de MediaPro.

Le prix des droits ? "Déraisonnables"

S'il se dit déçu de ne pas avoir remporté les droits, le dirigeant de Canal + estime toutefois qu'il était "impossible" et "totalement déraisonnable" pour le groupe de les acheter à ce prix- là. "C'était impossible pour nous de miser de telles sommes et je crois que c'est impossible pour un quelconque acteur de miser de telles sommes".

 

"Les droits acquis par Mediapro ont été payés 60 % de plus qu'aujourd'hui. Ce n'est pas raisonnable. Quelle que soit la mise de Canal, on aurait jamais mis ce prix-là", insiste-t-il. "On a été à la hauteur maximale de ce qui était possible. Il n'y a pas eu d'erreur par notre raisonnement. Il a été guidé par l'économie de Canal", ajoute-t-il.

Une charge contre Mediapro

Par ailleurs, Maxime Saada a mis en doute la viabilité du modèle économique du groupe Mediapro. "Regardez ce qu'il s'est passé en Italie. On a tout un tas de gens qui se sont exprimés sur le désastre italien pour découvrir, il y a peu, que l'attribution de ces droits ont été suspendus", rappelle-t-il. Début mai, la justice italienne a, en effet, suspendu l'offre que le groupe avait formulée sur les droits TV de la Serie A, le championnat italien, en estimant que la proposition du groupe espagnol avait été faite en violation des lois italiennes.

 

"J'estime qu'ils ont payé 800 à 850 millions d'euros pour les droits qu'ils ont acquis. Pour rentabiliser cette somme, il faudrait à peu près 7 millions d'abonnés à 15 euros par mois. BeIn sport ça fait 6 ans qu'ils sont là, ils sont à peine arrivés à 3,5 millions d'abonnés, alors qu'ils ont les droits de la Coupe du monde, l'Euro, le basket", énumère-t-il. "Cela n'a aucun sens de lancer une chaîne uniquement avec ces droits de Ligue 1", ajoute le dirigeant rappelant l'échec de la chaîne CFoot, coulée quelques semaines après sa création. "On pose beaucoup la question de la survie de Canal. Moi je pose la question de la survie de Mediapro. Je suis sûr que Canal + survivra".

Une procédure devant la Haute autorité de la concurrence ?

Canal + se laisse la possibilité de lancer une procédure devant la Haute autorité de la concurrence pour contester l'attribution des droits. "On va regarder comment ça s'est fait juridiquement. Il faut aussi voir si l'appel d'offres a été tenu correctement", précise le président du directoire de Canal +, indiquant qu'il allait "discuter avec cet acteur" qu'est Mediapro, grand vainqueur de l'appel d'offres. "Mediapro c'est d'abord un courtier. De toute façon, il viendra nous voir lui car Canal est éditeur et distributeur de chaînes".

Canal + ouvert à tous les scénarios

Maxime Saada estime ainsi que la partie n'est pas encore totalement jouée. Selon lui, il est encore possible que la chaîne cryptée rachète certains matches de Ligue 1 à Mediapro et que Canal + conserve son statut de "chaîne du foot". "Deux ans, c'est loin, il peut se passer tellement de choses entre maintenant et 2020", martèle le dirigeant tout en nuançant :"C'est un scénario et il y a un autre. Canal + s'est réinventé plusieurs fois. Il y a des moyens de se réinventer. On a un dispositif qui nous permet de résister à beaucoup de choses".

Un dispositif qui passe par le cinéma et les séries. "On a une offre généraliste, le Top 14, la Formule 1, la boxe, les séries, les créations originales de Canal +... Il n'y a pas un abonné à Canal + qui ne regarde que la Ligue 1. J'entends des chiffres fantaisistes sur la moitié de nos abonnés. Ce n'est pas vrai. Il y a deux millions de nos abonnés qui regardent occasionnellement de la L1 mais cela peut être moins d'un match par mois. Nos abonnés regardent essentiellement du cinéma, des séries", assure-t-il. "On a annoncé il y a quelques jours que nous allions lancer un abonnement à Canal + pour les moins de 26 ans. On verra comment on fera évoluer les choses".