Vol Alger-Paris, Noël 94 : "sur le moment, on ne pense pas à la mort"

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Guillaume Biet avec , modifié à
TÉMOIGNAGE - Il y a 20 ans, un commando du GIA prenait en otage les 173 passagers d’un vol Alger-Paris. Un membre du commando du GIGN se souvient.

C’était le 26 décembre 1994, il y a exactement 20 ans, et Alain Pustelnik, alors gendarme d'élite du GIGN, n’a rien oublié. Ce jour-là, les Français suivent depuis déjà 48 heures le détournement par des terroristes du Groupe islamique armé (GIA) d’un Airbus d'Air France à Alger. A bord du vol AF8969 : 173 otages. Ce 26 décembre, le vol Alger-Paris détourné le 24 à Alger fait escale à l'aéroport de Marignane pour faire le plein de carburant. La tension est vive : trois otages ont déjà été exécutés à Alger, les terroristes réclament la libération de membres du FLN et l’ultimatum expire à 17 heures. Paris décide donc de donner l’assaut.

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A 17H12, l'assaut est donné. Trois groupes du GIGN foncent vers l'avion, juchés sur des passerelles mobiles. L'un d'eux ouvre la porte avant de l'appareil à quelques mètres du cockpit où sont regroupés les terroristes.

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"Je suis blessé, je ne peux plus tenir debout". "Si vous vous rappelez les images, la porte a peu de mal à s’ouvrir : la passerelle recule, on est obligés de bondir à l’intérieur de l’avion", raconte Alain Pustelnik. Il est le troisième à pénétrer dans l’appareil. "En passant devant le cockpit, je suis blessé une première fois à la jambe gauche. Dans la minute qui suit, je suis touché une deuxième fois au niveau du genou droit et là, je ne peux plus me tenir debout". Les terroristes lancent des grenades. "C’était vraiment le déluge de feu immédiat", se souvient l’ex-gendarme.

"On a des automatismes". Comment Alain Pustelnik vit-il ces jets de grenade et ces échanges de tirs nourris pendant 20 minutes ? "A ce moment-là, on ne se dit plus grand-chose… On a des sortes d’automatismes, vous répétez ce que vous avez appris à l’entrainement : il faut faire attention aux otages, faire attention à vos camarades et faire attention à vous-même bien entendu".

"Comme dans Matrix". "Tout cela va à la fois très vite et très lentement", explique-il aujourd’hui. "Si je peux faire une comparaison qui va peut-être vous faire sourire, c’est un peu comme dans le film Matrix où vous voyez les choses qui se passent au ralenti".

"La mort ? On y pense avant". Et la mort ? "Sur le moment, on n’y pense pas. On y pense avant. Dans l’action, c’est d’autant plus facile que l’on n’est pas seul : on a tous nos camarades à coté de nous, c’est un bloc complet qui monte à l’assaut, ce n’est pas une personne seule".

"Une saine nostalgie". Même si longtemps après, Alain Pustelnik n’a rien oublié : "j’y pense souvent. C’est une saine nostalgie puisque tout s’est bien passé : on a réussi à sauver tous les otages qu’ils soient passagers ou membres d’équipage", rappelle-t-il.