Un char de carnaval pour "déporter les francophones"

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avec AFP , modifié à
Un faux wagon nazi destiné à "déporter les francophones" devant participer ce week-end au plus grand défilé du carnaval de Flandre a suscité l'indignation.

L'INFO. L'humour belge n'est plus ce qu'il était. Pour l'édition 2013, qui débute dimanche, du carnaval d'Alost, une ville située à 30 km de Bruxelles, une association folklorique a décidé de fabriquer un char qui suscite l'indignation. Et pour cause : on y retrouve pêle-mêle une haine anti-Wallon, un clin d'oeil de mauvais goût au IIIe Reich et à la déportation de millions de personnes, sans oublier une pique homophobe. Ce faux wagon nazi destiné à "déporter les francophones" doit participer ce week-end au plus grand défilé du carnaval de Flandre.

Le carnaval d'Alost a une histoire de plus de 600 ans et a été inscrit en 2010 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'Unesco. Les chars qui y défilent portent souvent de grands personnages caricaturant, parfois de manière féroce, les responsables politiques locaux ou nationaux.

• Le char polémique. L'association folklorique à l'origine de ce projet a donc construit un faux wagon de marchandises semblable à ceux utilisés par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale pour envoyer leurs victimes, surtout les Juifs et les Tziganes, dans les camps de la mort. Même les fils barbelés y sont, selon des images diffusées jeudi sur les télévisions flamandes. A l'intérieur du véhicule d'allure sinistre, qui diffusera en principe de la "musique allemande" au cours des trois jours de festivités, devrait se trouver une marionnette à l'effigie du Premier ministre, le socialiste francophone Elio Di Rupo, revêtue d'un t-shirt aux couleurs de l'arc-en-ciel.

Une dizaine de membres de la société carnavalesque défileront à côté du char, en uniforme de SS sur lequel on peut voir le sigle de la N-VA remplacé par "SS-VA", ont-ils expliqué tout sourire. L'affiche du groupe, un photo-montage, montre quant à elle Bart De Wever en officier nazi. Bien que directement visés, les dirigeants de la N-VA, qui récusent tout lien avec l'extrême droite, ne se sont pas offusqués outre mesure.

Les réactions. "On ne fait pas de la politique quand on qualifie les francophones de manière aussi méprisante, comme des déportés, et qu'on fait allusion de manière scandaleuse à un drame de notre histoire. Il y a des choses dont on ne rit pas", a réagi le chef du gouvernement régional wallon, Rudy Demotte. "Il ne faut jamais banaliser la Shoah et la déportation", a, quant à elle, estimé la ministre de l'Intérieur, la centriste francophone Joëlle Milquet.

"L'esprit du carnaval, c'est d'exagérer. Mais ici, c'est de mauvais goût", a simplement réagi Bart De Wever, le patron des indépendantistes flamands et du parti la Nouvelle alliance flamande N-VA. Une représentation de ce dernier figure d'ailleurs sur le char déguisé en officier SS. Un autre responsable flamand, non membre de la N-VA, le vice-Premier ministre libéral Alexander De Croo, a estimé qu'il fallait "aller au carnaval d'Alost" pour comprendre que, si "ce n'est pas toujours de bon goût", cela se passe "dans un contexte où on a l'habitude de se moquer de tout et de tout le monde".