Il y a un an, Emmanuel Macron recevait les représentants de cinq pays du Sahel où est engagée l'opération Barkhane. 0:48
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Didier François et Romane Hocquet, édité par Romain David
Alors que la France et cinq pays du Sahel se réunissent à partir de lundi pour discuter de l'avenir des opérations antiterroristes dans la région, Paris souhaiterait pouvoir progressivement réduire le nombre de soldats français mobilisés sur place.
DÉCRYPTAGE

Huit ans après le début de l'opération Barkhane, où en est l'engagement français dans la région ? La France et cinq pays du Sahel se réunissent à partir de lundi pour un sommet de deux jours. Un rendez-vous fixé à N'Djaména au Tchad, et qu'Emmanuel Macron suivra à distance tout comme le président du Conseil européen, Charles Michel. Paris ne cache pas sa volonté de réduire la voilure : le pays doit "ajuster son effort", assurait en janvier dernier le chef de l'Etat alors que 5.100 soldats français sont actuellement déployés sur place.

Si on se concentre sur l'année écoulée, le bilan de l'opération Barkhane est plutôt positif, surtout si on compare la situation à celle de l'année 2019, qui avait abouti à la convocation d'un sommet du G5 Sahel en catastrophe à Pau, alors que les armées du Mali, du Niger et du Burkina Faso venaient de subir une série de défaites traumatisantes face à une offensive tous azimuts lancée par les groupes djihadistes. 

Reprise en main de la zone des "trois frontières"

Le président Macron avait alors décidé de muscler significativement les effectifs de l'opération Barkhane avec un renfort de 600 hommes déployés justement dans cette zone frontalière entre les trois pays visés par l'offensive des islamistes. Aujourd'hui, les résultats obtenus sont vraiment spectaculaires, avec environ 1.500 djihadistes tués. Douze soldats français sont tombés au combat sur la même période.

Les coups portés aux combattants de l'Etat islamique les ont obligés à s'éparpiller en petits groupes. Ils ne sont plus capables de monter des assauts d'envergure, et la direction d'Al-Qaïda a été en grande partie décimée avec la neutralisation de son chef et de son commandant militaire. De quoi remonter singulièrement le moral des forces armées locales, lesquelles reviennent doucement dans les casernes qu'elles avaient abandonnées. 

Des progrès à consolider

Le président de la République peut donc envisager désormais une réduction du nombre de soldats français déployés dans Barkhane. Mais ce processus prendra plusieurs mois. D'autant que les progrès accomplis restent fragiles. Le colonel Raphaël Bernard, qui a quitté l'armée en juillet 2020, a participé à plusieurs opérations au Mali entre 2014 et 2020. Si pour cet ancien militaire, l'opération Barkhane est une réussite, le départ de la France dans la région doit être anticipé. "Le but de Barkhane, c'est véritablement de mettre l'ennemi djihadiste à la portée des forces armées locales. Ça ne doit pas durer indéfiniment car si nous restons trop longtemps, cela serait contreproductif", veut-il rappeler au micro d'Europe 1.

"Huit ans, c'est déjà long. Je pense que c'est le bon timing pour penser au désengagement de Barkhane sur un horizon de 2 à 3 ans", pointe-t-il. Car il n'est pas question de laisser penser aux djihadistes que la France abandonne le terrain. "Il faut que l'opération Barkhane reste présente avec des moyens de type aviation/hélicoptères, mais que la masse de combat soit peu à peu réduite", détaille Raphaël Bernard. "Il faut continuer à impliquer nos camarades européens, afin que nous partagions cette charge de la sécurité du Sahel qui est, ne nous le cachons pas, la frontière sud de l'Europe", conclut-il.