Barrage de Sivens : Bruxelles ouvre une procédure contre la France

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et Isabelle Ory avec AFP , modifié à
SUITES - Cette procédure d'infraction porte sur le respect des directives européennes sur l’eau.

La Commission européenne a ouvert officiellement une procédure d’infraction contre la France, dans le dossier du barrage de Sivens, a annoncé mercredi une source européenne. Ce qui est reproché par Bruxelles, c’est le non-respect supposé de directives européennes sur l’eau dans un chantier, où un jeune contestataire au projet a trouvé la mort. 

Prochaine étape : la justice européenne. La Commission a pris cette décision car, "sur la base des informations dont elle dispose, les autorités françaises ont lancé le projet nonobstant la détérioration de l'état écologique de la masse d'eau qu'il est susceptible d'entraîner", a-t-on précisé. La directive sur l'eau vise à garantir "une gestion durable de l'eau à long terme", a-t-on rappelé. Le chantier du barrage aurait détruit des zones humides, alors que les directives européennes prévoient leur protection.

Bruxelles a donc décidé d’envoyer une lettre de mise en demeure à Paris, qui a deux mois pour y répondre. La prochaine étape pourrait être de porter le dossier devant la justice européenne. La semaine dernière, la Commission avait ouvert une enquête sur ce projet d’infrastructures, contesté par des écologistes dans le Tarn.

Le collège des commissaires, l'organe politique de l'institution, avait été alerté par des opposants à la retenue d'eau, après la mort de Rémi Fraisse tué par une grenade offensive le 26 octobre. Les représentants européens s'étaient particulièrement penchés sur les directives habitats, en matière de protection des forêts et des zones humides, et sur les règles européennes de financement.

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Les défenseurs de la zone humide satisfaits. Un porte-parole des opposants au projet de barrage de Sivens (Tarn), Ben Lefetey, s'est félicité mercredi de l'ouverture par la Commission européenne d'une procédure d'infraction contre la France sur le projet contesté."Nous nous réjouissons de cette décision" a réagi M. Lefetey, porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, détruite par la construction du barrage de Sivens pour l'instant suspendue.Il s'agit d'une "reconnaissance par la commission européenne que nous avons raison depuis plusieurs années quand nous disons que le barrage de Sivens ne respecte pas les lois sur l'eau au niveau français et européen", a-t-il déclaré.

Le porte-parole a précisé qu'il n'avait pas encore de précisions sur les motivations de l'ouverture de la procédure d'infraction par la commission européenne.Mais, a-t-il expliqué, "si la commission européenne vise la rupture de la continuité écologique - le fait par exemple de mettre un barrage qui empêche la migration des poissons - ça écarterait toute poursuite du barrage de Sivens, même redimensionné". "Si c'est bien sur cet aspect-là que la commission européenne critique le projet, il ne sera pas possible de construire le barrage, même en modifiant l'affectation de l'eau", comme l'avaient suggéré les experts mandatés par le gouvernement dans leur premier rapport.

Le projet "mort". Interrogé par Europe 1, un connaisseur du dossier l'assure : le projet du barrage "est mort" après cette décision de la Commission européenne. L'Union européenne devait en effet financer la retenue d'eau à hauteur de 30% et la procédure bloque tout financement. Si la Commission européenne conclut dans quelques mois au respect de ses directives dans le chantier, la France aura dans tous les cas dépassé les délais pour demander ces fonds.

Valls était confiant... Ségolène Royal, la ministre de l'Ecologie, a promis mercredi que le futur projet de barrage de Sivens respecterait les "critères" européens. "Les observations qui vont être dans ce document européen, notamment sur la qualité des masses d'eau, [vont] nous permettre, en intégrant ces critères, de faire en sorte que le nouveau projet respecte" les directives, a déclaré la ministre en réaction à la décision de Bruxelles. En début de semaine, le Premier ministre Manuel Valls s’était dit confiant sur les suites de l’enquête de Bruxelles. "Moi, je ne crains rien", avait déclaré le chef du gouvernement.