Réunion sur Boko Haram : pourquoi le Nigeria ne sera pas le Mali

Le résultat d'une attaque de Boko Haram au Nigeria (illustration)
Le résultat d'une attaque de Boko Haram au Nigeria (illustration) © REUTERS
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La réunion sur la sécurité au Nigeria qui se tient samedi à Paris ne débouchera sûrement pas sur une intervention française. Europe 1 vous explique pourquoi.

LA REUNION. Neuf représentants internationaux se réunissent à Paris, samedi, pour discuter de la sécurité au Nigeria, secoué depuis près de dix ans par une insurrection islamiste dans le nord-est du pays. L’enlèvement de 200 lycéennes par Boko Haram au mois d’avril a relancé l’implication des puissances occidentales dans ce conflit régional.

Une rébellion islamiste qui prend le contrôle d’une partie d’un pays africain. Le scénario ressemble à s’y méprendre à celui du Mali en 2011. Et pourtant, François Hollande a tenu à préciser qu’il "n’est pas question d’une intervention militaire occidentale contre Boko Haram". Plusieurs raisons poussent en effet la France à rester dans son rôle de médiateur.

Le Nigeria, hors du pré carré français

Entouré de pays francophones, le Nigeria, ancienne colonie britannique, est le seul pays anglophone de cette zone. Les liens particuliers entre Paris et ses anciennes colonies n’ont pas été tissés avec le Nigeria.

Pour autant, la présence de grandes entreprises françaises comme Total et Veolia dans le golfe de Guinée pousse François Hollande à s’impliquer dans le dossier épineux de la rébellion islamiste.

Qui plus est,les islamistes des Boko Haram ont plusieurs fois visé Paris avec des rapts de ressortissants français. "Boko Haram garde en tête que l’Etat français a conduit des opérations contre leurs cousins d’AQMI", signale à L’Express Betrand Monnet, spécialiste des risques terroristes à l’EDHEC.

Après son intervention au Mali, François Hollande semble être devenu l’homme de la situation. "Si aujourd’hui, François Hollande a pu prendre une initiative pour le Nigeria, […] dans une région qui ne fait pas partie de la sphère d’intérêts de la France, c’est parce que celle-ci est forte de son expérience dans le contre-terrorisme" en Afrique sub-saharienne, souligne Bruno Tertrais, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique.

L’armée nigériane a ses propres méthodes

"Les offensives de l’armée nigériane sont particulièrement violentes", selon Bertrand Monnet, et donc incompatibles avec une collaboration avec des armées occidentales. L'armée nigériane était, jusqu’à présent, relativement efficace. Boko Haram avait été mis en grande difficulté et forcé de se réfugier au Cameroun, hors de son fief nigérian. "Aujourd’hui, Boko Haram peut assez librement franchir les frontières, trouver un refuge dans les pays voisins, s’approvisionner en armes", dit-on au ministère français de la Défense. Ce qui manque aujourd’hui est donc moins de la force militaire qu’une réelle coordination régionale entre le Tchad, le Cameroun, le Benin, le Niger et le Nigeria.

"L’idée est de réduire ses possibilités à travers l’échange de renseignements et une meilleure surveillance des frontières", ajoute-t-on au ministère de la Défense. Et la France se cantonnera dans son rôle de médiateur, selon Antoine Glaser, fondateur de la Lettre du continent et spécialiste de la politique africaine. Demander l'intromission d'une puissance occidentale, il juge que "c’est à l’ancienne".

Goodluck Jonathan, un président à poigne

Goodluck Jonathan nigeria

© Reuters

Car par ailleurs, contrairement à Bamako, l’Etat nigérian est fort et "jamais il ne permettra à une puissance extérieure de s’ingérer dans ses affaires intérieures", expliquait Bertrand Monnet à L’Express, sur les problèmes de piraterie auxquels fait également face le Nigeria.

Il est donc déjà étonnant que Goodluck Jonathan, le président, ait accepté que des puissances étrangères lui viennent en aide, en mettant à disposition du matériel et des experts. Avec cet aveu de faiblesse, il perd la face, selon Afrik.com. Il est donc hors de question, pour lui, que des armées étrangères donnent des assauts sur son sol.

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