Selon le projet de loi, au moins une femme devra siéger dans les instances dirigeantes des entreprises allemandes comptant plus de trois administrateurs. (Illustration) 3:59
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Hélène Kohl et Pauline Jacot, édité par Laetitia Drevet , modifié à
Un projet de loi imposant la présence de femmes dans les conseils d'administration des grandes entreprises devrait bientôt être voté au parlement allemand. Malgré une politique d'incitation, la république fédérale accuse un net retard en la matière. 

L'Allemagne devrait bientôt imposer la présence de femmes dans les conseils d'administration des grandes entreprise. Il s'agit sans doute là d'une des dernières grandes réformes de la chancelière Merkel, qui quittera son poste en septembre. Selon le projet de loi, qui doit encore être adopté par les députés, au moins une femme devra siéger dans les instances dirigeantes des entreprises allemandes comptant plus de trois administrateurs. Pour le moment, le pays accuse un net retard sur la question. 

13% de femmes dans les conseils d'administration

Aujourd'hui, les femmes représentent à peine 13% des membres des conseils d’administration, alors que le pays pousse les entreprises à la parité depuis près de 15 ans, déplore Angelica Marte, qui dirige une PME de conseil sur la diversité. "Une étude récente dit que si nous continuons au même rythme, la parité prendra cent ans à arriver ! Il faut sortir du schéma de guerre des sexes pour se demander comment y arriver ensemble."

Pour les trente plus grands groupes de chaque pays, cette proportion est de 28,6% aux Etats-Unis, 24,9% en Suède, 24,5% en Grande-Bretagne et 22,2% en France, indique cette étude de la fondation germano-suédoise Allbright. 

La politique d’incitation, amorcée ces dernières années, a échoué. C'est finalement la droite allemande qui débloqué cette loi de quotas, alors qu'elle s'y était auparavant opposée. Ria Schröder, du parti libéral proche des milieux d’affaires, s’est convertie à l’idée. "Ca me fait mal de voir que sans cela, nous n’arrivons pas à faire que ce soit normal d’avoir des femmes autour de la table. Mais je ne veux pas non plus que maintenant, on se dise qu’il y a une partie des postes de pouvoir réservés aux femmes."

73 entreprises seraient concernées

Le projet de loi est critiqué par une partie du patronat qui dénonce une ingérence dans la gouvernance des entreprises. De l'autre côté, l'avancée est jugée insuffisante par les défenseurs de la parité qui estiment que l'impact du quota ne concernera qu'un nombre limité d'entreprises privées. Au total, 73 entreprises seraient concernées par le changement de règle, dont 32 n'ont actuellement pas de femme dans leur conseil d'administration, selon le groupe de réflexion FidAR, qui prône la représentation des femmes au sommet des entreprises.

La loi ne prévoit pas de quota précis et une seule femme directrice suffira pour éviter les sanctions. Mais elle doit permettre de rompre avec la monoculture masculine qui est la norme dans plus d’un tiers des grandes entreprises, comme le chimiste Bayer ou Adidas.

Quid de la parité dans les grandes entreprises françaises ?

La situation est plus avancée en France, même si on est encore loin de la parité. Au sein des 120 plus grandes entreprises cotées en France, il n’y a que 22 % de femmes dans ces comités. Trois femmes seulement sont PDG et une seule femme dirige aujourd’hui d’une entreprise du CAC 40, Catherine Mc Gregor la DG d’Engie.

Une nette progression a toutefois été observée ces dernières années. En 2010, les comités de direction ne comptaient que 6% de femmes. Le plafond de verre se fissure mais ne casse pas, disent les observateurs.

Bruno Le Maire avait tenté en 2019 d’imposer, comme en Allemagne, une loi de quotas. La tentative avait échoué très rapidement. "Impossible à mettre en place", "pas assez de femmes qui ont le profil", "ces quotas sont une prime à l’incompétence" : voilà ce qu’en dit encore aujourd’hui dans l’entourage d’une grande organisation patronale.