"L’ETA est dans un état catastrophique"

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La dernière organisation terroriste d’Europe va mal, mais elle conserve toujours un pouvoir de nuisance.

L’ETA a connu des périodes plus fastes. Euskadi Ta Askatasuna (ETA) - Pays basque et liberté, en français - se porte mal. Depuis quelques années, les coups de filets se multiplient au sein du réseau terroriste, désormais dépouillé d’un bon nombre de ses adeptes. Parmi ceux qui se trouvent derrière les barreaux figure Zigor Garro Perez, alias "Tonino", dont le procès a été fixé, mardi, aux 3 et 4 mai prochain. L’homme est un ancien chef présumé de l'appareil logistique de l'ETA, interpellé en novembre 2006 à Quezac avec sa compagne. Et "Tonino" est loin d’être le seul cerveau de l’ETA en prison.

850 en prison, 150 sur le terrain

"On compte aujourd’hui 850 membres de l’ETA détenus pour 150 encore libres et actifs sur le terrain", précise Jean Chalvidant, criminologue et spécialiste de l’organisation terroriste, à europe1.fr. "Autrement dit, l’essentiel de l’organisation est derrière les barreaux et l’ETA est dans un état catastrophique", ajoute le spécialiste.

Pendant des années, l’ETA s’est appuyé sur son bras politique, le parti indépendantiste Batasuna, créé en 2000. Mais depuis que le parti a refusé de dénoncer les violences commises par la branche armée d’ETA - comme le lui demandait le gouvernement espagnol - il est interdit en Espagne. Une décision confirmée par la Cour européenne des droits de l'homme le 30 juin 2009.

Une douzième trêve trop fragile

Mais Batasuna compte bien opérer un retour sur la scène politique espagnole lors des prochaines élections régionales et municipales de mai 2011. "Le parti aspire à un compromis vers la paix, alors que l’ETA, elle, n’entend pas vraiment abandonner le combat", explique Jean Chalvidant. Malgré une proclamation de cessez-le-feu permanent annoncée lundi 10 décembre par l’ETA, Madrid semble peu convaincu par la volonté du groupe terroriste de mettre fin à la lutte armée.

"Nous avons insisté à de nombreuses reprises sur le fait que le seul communiqué que nous voulions lire est celui dans lequel l'ETA annonce la fin, de manière irréversible et définitive (de la lutte armée, ndlr). Il est évident qu'aujourd'hui, une fois de plus, l'ETA n'a pas fait ce que nous espérions", avait déclaré Alfredo Perez Rubalcaba, ministre de l’Intérieur, peu de temps après l’annonce.

Un tournant décisif en mai

"Des trêves, l’ETA en a déjà annoncé onze avant celle-ci et elle les a toutes rompues", note Jean Chalvidant. "A travers ce communiqué, l’ETA espère que Madrid baisse la garde et ralentisse les arrestations. Mais ça ne sera pas le cas, le gouvernement espagnol n’est pas dupe", ajoute-t-il, soulignant que si l’organisation semble affaiblie aujourd’hui elle continue néanmoins à peser sur la vie politique au pays basque. "Tous les politiques de cette région ont un garde du corps et sans-cesse la peur de trouver une bombe sous leur voiture", confie le criminologue.

L’ETA est faible, certes, mais peut encore nuire. "Tout se jouera au mois de mai", analyse Jean Chalvidant. "Si Madrid accepte que Batasuna revienne dans la course politique cela pourra calmer l’ETA. Par contre, si Batasuna est toujours interdit, alors l’ETA pourrait décider de reprendre les armes et de frapper une nouvelle fois".