Christine Ockrent : "Je pense qu’Hillary Clinton va gagner"

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#E1USA - Invitée de la Social Room d’Europe 1, Christine Ockrent a répondu aux questions des internautes sur Hillary Clinton.

Christine Ockrent a inauguré mardi Le quart d’heure américain, une série de quatre "Social Room" dédiées à l’éléction américaine. En direct sur Facebook, Christine Ockrent a répondu aux questions des auditeurs d’Europe 1. La journaliste publie Clinton/Trump, l’Amérique en colère aux éditions Robert Laffont.

Les principales déclarations de Christine Ockrent dans la Social Room d’Europe 1 :

Pourquoi Hillary Clinton va gagner. "Donald Trump ne cesse de faire du Donald Trump ! Ça lui a servi pour écraser ses rivaux dans la primaire républicaine, mais il continue de parler à son noyau dur. Il ne fait rien pour élargir sa zone d’attractivité, il ne fait rien pour calmer les angoisses des hispaniques ou adoucir la répulsion des femmes. C’est étrange : cet homme qui n’a aucune expérience des affaires politiques est entré dans la campagne pour renforcer sa marque ! Il fait du marketing ! Il a compris qu’il y avait une part de marché que ses adversaires républicains n’avaient pas identifiée : la xénophobie, la peur de l’immigration mexicaine. Il a su mettre des mots sur la colère d’une certaine Amérique, celle qui est au milieu du pays, l’Amérique des hommes blancs d’un certain âge, pas très éduqués, qui ont souffert de la crise économique, qui s’estiment être les perdants de la mondialisation, qui voient la culture américaine dériver de leurs propres valeurs."

Elle a raté son slogan. "La principale erreur a été de ne pas affirmer un message et un slogan clairs dès le début. On peut penser ce qu’on veut de Donald Trump, mais son slogan "Make America Great Again" est très efficace. Hillary Clinton a changé de slogan, et son dernier, martelé pendant le débat, est "On est plus fort ensemble". Son problème a aussi été de ne pas pouvoir se démarquer de Barack Obama : le parti démocrate a fait deux mandats avec lui. Il n’y a qu’une seule fois dans l’histoire politique contemporaine aux USA où le même parti a exercé trois fois de suite le pouvoir, c’était avec Reagan et Bush. Mais Hillary ne pouvait pas ouvertement critiquer ce qu’a fait Obama, notamment sur le plan économique et sur la politique de santé."

Sur son impopularité. "Son problème, c’est d’être dans les circuits depuis trente ans ! Les jeunes la connaissent depuis toujours ! Mais Hillary Clinton est populaire quand elle est aux affaires : au département d’État, au Sénat, à la Maison-Blanche. Beaucoup de gens au sein du parti démocrate ont compris qu’elle avait sauvé son mari de la destitution. En campagne, ce n’est pas une candidate très efficace : elle n’a pas l'éloquence de Bill ou Barack, elle n’a pas cette facilité à se mouvoir sur scène, mais c’est une bosseuse. On le verra dans le prochain débat : elle connaît son affaire."

Bill Clinton, un boulet ? "Non, Bill Clinton reste un extraordinaire politicien. Il avait beaucoup plus gêné en 2007, quand Hillary Clinton faisait campagne contre Barack Obama, car il se mêlait de tout. Mais lui et elle sont deux personnes très complémentaires. Cette fois, il a été fortement encerclé par l’équipe d’Hillary, on lui a confié une tâche très importante qui a consisté à animer les minorités. Il a fait deux gaffes, dont la dernière sur le système de santé. Ce n’était pas très heureux, mais ça a été balayé par le scandale des propos sexistes de leur adversaire républicain."

Son action à venir. "Le système de santé et la restriction du port d’arme sont sûrement les deux dossiers les plus difficiles si elle est élue ! Cela dépendra de la majorité qu’elle pourra avoir au Sénat. Sans le Congrès, elle ne peut rien faire. Obama a été coincé plusieurs fois. Sur le port d’arme, c’est très singulier : le 2ème amendement garantit aux citoyens le droit de porter des armes. Mais face aux assassinats à répétition et les tensions raciales, Hillary Clinton s’est engagée à réduire les zones où les gens ont le droit de porter des armes. Ça a permis à Trump de lancer pratiquement un appel à l’assassinat. Ça a fait scandale : la mémoire américaine est marquée au fer rouge par les assassinats politiques."

Hillary ou Trump, ça change quoi ? "Énormément de choses ! Pour Trump, les Français sont des cons car ils ne sont pas armés, et si on l’avait été on aurait évité les attentats du Bataclan et de Nice. Il proclame sans arrêt son admiration pour (Vladimir) Poutine, il a une certaine admiration pour Kim Jong-Un (dirigeant nord-coréen). Prenons-nous tout cela au sérieux ou disons-nous qu’il est un bateleur qui assure le spectacle ? Les observateurs disent que s’il est élu, il sera entouré de gens raisonnables. Cet homme envoie des tweets vengeurs la nuit à une ex-reine de beauté sous prétexte qu’elle a grossi. On se dit que ce n’est pas un tempérament à qui on a envie de confier l’arme nucléaire…"