Birmanie : inquiétudes à la veille d'élections législatives historiques

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avec AFP
Ces élections pourraient permettre à l'opposante Aung San Suu Kyi de parvenir au pouvoir mais l'opacité entourant notamment le vote anticipé des militaires samedi inquiète les observateurs.

Dimanche, en Birmanie, ce sera une première pour la plupart des électeurs appelés à voter pour les élections législatives. Les dernières élections libres du pays remontent en effet à 1990. Cependant, l'absence d'accès des observateurs étrangers au vote anticipé des 500.000 militaires samedi suscite déjà les critiques de l'opposition.

30 millions d'électeurs appelés aux urnes. Pour les premières élections libres depuis 25 ans en Birmanie, plus de 30 millions d'électeurs - néophytes pour la plupart- sont appelés à voter. La campagne a été dominée par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) de l'opposante et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi et le Parti pour la solidarité et le développement (USDP) au pouvoir.

Lors d'une dernière conférence de presse jeudi, Aung San Suu Kyi, qui a passé 15 ans enfermée en résidence surveillée à l'époque de la junte, a prévenu qu'elle "dirigerait le gouvernement" et aurait la main sur la présidence, même si la Constitution la prive du poste suprême.

Un scrutin déjà critiqué. Dans certaines régions du pays, les habitants ne pourront pas voter en raison des conflits. Observateurs et membres de l'opposition ont, par ailleurs, émis de nombreuses critiques contre l'organisation du scrutin : listes électorales erronées, vote anticipé à l'étranger chaotique et pas d'accès pour les observateurs étrangers au vote anticipé des 500.000 militaires.

"Le processus aurait été plus transparent si nous avions été autorisés à envoyer des observateurs" dans les casernes où se déroule le vote anticipé, a regretté Alexander Graf Lambsdorff, le chef de la mission des observateurs européens. Les soldats de la puissante armée birmane, qui sont estimés entre 400.000 et 500.000, sont en effet une composante non négligeable d'un corps électoral de plus de 30 millions d'électeurs.

Par ailleurs, sous la pression de moines bouddhistes extrémistes, le gouvernement n'a pas permis l'accès au vote de centaines de milliers de musulmans de la minorité des Rohingyas, vivant principalement dans l'Ouest, dans des conditions dénoncées par la communauté internationale.

Pas de résultats avant des jours. Les résultats, impossibles à anticiper en l'absence de tout sondage crédible en Birmanie, ne sont pas attendus avant plusieurs jours. Ils seront observés de près dans les milieux économiques alors que les investisseurs affluent en Birmanie, depuis l'ouverture du pays en 2011 au moment de l'auto-dissolution de la junte.

Comment va réagir le pouvoir ? Ces derniers jours, les inquiétudes se multiplient quant au degré réel de préparation logistique des élections. La réaction du pouvoir, tenu par d'anciens généraux convertis aux réformes depuis 2011, face à la possible victoire du parti de l'opposante Aung San Suu Kyi, qui a passé 15 ans en résidence surveillée jusqu'en 2010, est aussi une grande inconnue. La police est en "alerte rouge", et ce jusqu'à mardi inclus, avec les écoles fermées lundi et mardi. Le président Thein Sein, ex-général et dernier Premier ministre de la junte, met en garde contre la tentation d'imiter les révolutions populaires du "printemps arabe". Il a affirmé dans une allocution télévisée vendredi soir que "le gouvernement et l'armée respecteront le résultat du vote".

Mais Phil Robertson, représentant de l'ONG Human Rights Watch se dit inquiet que le président Thein Sein puisse ne pas être suivi par les tenants d'une ligne plus dure parmi les héritiers de la junte qui a régné durant près de 50 ans sur le pays.  "Le président dit qu'il acceptera les résultats, c'est bien... Mais ça ne veut pas dire que les gens derrière lui, y compris l'armée birmane - qui est le vrai détenteur du pouvoir en coulisses ici- le suivront", explique-t-il.

 
Birmanie : Aung San Suu Kyi prête à gouvernerpar Europe1fr