Après huit ans d’austérité, la Grèce se prépare à vivre sans les aides européennes

Rues d'Athènes 1280
© Carole Ferry pour Europe 1
  • Copié
Carole Ferry, édité par Romain David , modifié à
La Grèce s'apprête à tourner la page des plans de sauvetage européens, mais le quotidien des Grecs reste particulièrement précaire.
L'ENQUÊTE DU 8H

L'Eurogroupe se réunit jeudi pour préparer la sortie de la Grèce du plan d'aide européen prévu le 20 août prochain. Le pays aura reçu 300 milliards d'euros de prêts en échange d'un plan d'austérité et de reformes drastique. Les comptes de l'Etat sont à l'équilibre, même si la dette reste immense et les conditions de vie dans le pays fortement dégradées.

Commerçant désœuvré. Les huit années d'austérité restent un traumatisme pour les Grecs. À Athènes, dans le quartier de classe moyenne d'Ilissia, Stratos, cigarette à la main à coté de ses machines à repasser qui ne comptent plus les années, déplore la perte de ses six pressings, dont un juste à côté du parlement. Il ne possède plus qu'une seule boutique désormais. "Je suis spécialisé dans le nettoyage du cuir. Quand tu fais 150 pièces par semaine et que ça passe à 100, tu te dis : 'je vais faire face'. Et à ce moment-là, tu n'imagines pas qu'en deux à trois ans, tes deux principaux concurrents auront fermé, et que des pièces en cuire, tu n'en auras plus que sept", raconte-t-il à Europe 1. L'un de ses clients, qui payait autrefois rubis sur l'ongle, a dû le régler en bijoux la veille.

pressing640

Stratos, à l'ouvrage dans la dernière des six boutiques qu'il possédait avant la crise. Crédit : Carole Ferry pour Europe 1

Salaires et retraites divisés par deux. Il faut dire qu'en huit ans, les impôts ont explosé, les salaires ont été réduits de 30% en moyenne. Interrogée par Europe 1, une enseignante d'une école privé dans laquelle les parents n'ont plus les moyens de mettre leurs enfants a même vu sa paie divisée par deux. "En 2000, j'ai touché un salaire de 2.000 euros par mois, en 2016, c'était arrivé à 1.000 euros. Avec trois enfants, ça n'était pas du tout facile", confie-t-elle. "Quand les enfants étaient plus jeunes, les courses coûtaient 150 euros, maintenant j'y vais avec une liste : je dois compter".

Les retraités font clairement partie de ceux qui ont le plus souffert. Yohanis, 88 ans, est un ancien général qui a travaillé pour l'Otan. Il avait 3.700 euros de retraite avant la crise et ne touche plus que 1.500 euros aujourd'hui. Une nouvelle baisse est prévue le 1er janvier prochain. "La baisse des retraites a été dramatique", se désole-t-il. "Vous voyez ce pantalon ? C'est le seul que j'ai, et il a dix ans ! Avant, j'avais de l'argent de côté, mais maintenant je n'ai plus rien. Je ne sais pas comment je vais faire".

cerises1280

Dans les rues d'Athènes, le kilo de cerises coûte moins d'un euro. Crédit : Carole Ferry pour Europe 1

Des signaux encourageants. Pourtant la croissance repart, avec plus de 2% au premier trimestre, mais elle ne se ressent pas encore dans le quotidien des grecs. Le tourisme, qui tire la croissance du pays, bat de nouveaux records chaque année depuis cinq ans. De grandes chaînes hôtelières investissent à Athènes. Mais au-delà de ce secteur, d'autres signes positifs peuvent être relevés : Leroy Merlin et Tesla, la marque de voiture de luxe américaine, s'installent en Grèce. De quoi susciter de l'espoir, notamment chez les jeunes malgré un taux de chômage de 40%. Mais chez les plus âgés, en revanche, beaucoup disent craindre de ne plus jamais revoir la Grèce qu'ils ont connue.