Wikileaks : la France vue par les Etats-Unis

La position de Paris sur la guerre en Irak n’a pas entaché la collaboration sur la lutte anti-terroriste.
La position de Paris sur la guerre en Irak n’a pas entaché la collaboration sur la lutte anti-terroriste. © REUTERS
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La position de Paris sur la guerre en Irak n’a pas entaché la collaboration sur la lutte antiterroriste.

Bien que les relations entre Washington et Paris ont été refroidies par l’opposition de la France à la guerre en Irak, la coopération policière et judiciaire, elle, n'a fait que se renforcer. C’est ce que révèle LeMonde, selon de nouveaux documents fournis par Wikileaks et analysés par le quotidien.

Un télégramme envoyé de Paris le 7 avril 2005, souligne une coopération "mature et étendue (…) largement hermétique aux bisbilles politiques et diplomatiques quotidiennes qui peuvent faire de la France un allié souvent difficile".

"Hautement professionnelle"

Selon le quotidien, les Américains "ont trouvé en France des experts très au fait de la menace originaire du Maghreb, disposant d'un vaste maillage policier sur le territoire et d'une législation particulière, qui offre aux magistrats spécialisés une latitude unique en Europe".

Pour l'ambassade américaine (dans une note du 17 mars 2005), "la communauté antiterroriste du gouvernement français est hautement professionnelle, mais insulaire et centralisée à Paris." Quant aux magistrats spécialisés, ils "opèrent dans un autre monde que celui du reste de la justice."

Jean-Louis Bruguière fait des confidences

Mais les Etats-Unis ne portent pas qu’un regard positif sur la lutte antiterroriste. Toujours selon les documents fournis par Wikileaks, le quotidien indique que le juge anti-terroriste, Jean-Louis Bruguière, aurait fait des confidences sur l’avancée d’une enquête au cours d’un déjeuner à l'ambassade américaine le 24 janvier 2005. "Le magistrat révèle que plusieurs suspects ont été arrêtés ce matin-là dans le cadre d'une enquête sur une filière d'envoi de candidats au djihad en Irak", rapporte le Monde. Des confidences faites au mépris du secret de l'instruction.

Pour l'avocat William Bourdon, interrogé sur Europe 1 , de telles pratiques sont "un coup de canif dans l'Etat de droit" :

Malgré la qualité des échanges opérationnels, les Américains n'hésitent à avoir un regard critique sur les actions menées par la France. "La France semble souvent réagir différemment au terrorisme et à l'islam radical en fonction de la distance qui l'en sépare. Sur son territoire, le gouvernement français réagit pro-activement, avec vitesse et fermeté. Ailleurs dans le monde, c'est bien plus équivoque. Les considérations politiques et diplomatiques pèsent un poids considérable", peut-on lire dans un télégramme diplomatique datant du 17 mars 2005, émis par l'ambassade américaine à Paris.

La question des minorités

Autre réserve émise par Washington : la question des minorités. La France "doit veiller à accorder une place aux musulmans dans l'identité française (qu'ils soient des immigrés de la première génération, leurs enfants de la seconde ou de la troisième génération, ou un nombre croissant de convertis)", écrit un diplomate dans une note du 17 août 2005. Il souligne à ce sujet deux préoccupations : "le poids des convertis et la situation dans les prisons, haut lieu du prosélytisme radical", rapporte Le Monde.