En Méditerranée, des passeurs de migrants sans limite

© AFP/COSTA GUARDIERA
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Chaque mois, des centaines de migrants meurent en mer Méditerranée. Des trafiquants d'êtres humains prospèrent sur leur sort.

Une hécatombe de plus dans la ruée vers l'Europe. Ce week-end, au moins 400 migrants ont disparu entre la Libye et l'Italie dans un nouveau drame en Méditerranée, a dénoncé lundi l'association Save the children. Comme eux, des dizaines de milliers de personnes mettent chaque année leur vie en péril pour tenter de survivre ailleurs aux conflits qui ravagent leur pays. Depuis le début de l'année, 900 personnes ont péri, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Une traversée parfois fatale en raison des conditions météo mais surtout à cause de passeurs sans scrupules.

Abandonnés à leur sort. Il n'est pas rare qu'un bateau transporte plusieurs centaines de personnes, qui payent chacune entre 1.500 et 3.000 euros, rapportait sur Europe 1 Philippe Leclerc, représentant du Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés auprès de la France. Ces trafiquants d'êtres humains empochent donc des centaines de milliers d'euros pour chaque traversée, qu'elle aboutisse ou non. 

Les circonstances du drame de ce week-end sont encore floues. Mais d'après les premiers témoignages recueillis par les associations, il semble qu'un mouvement de foule, initié à la vue des secours, ait retourné l'embarcation. Un terrible réflexe à la mesure du désespoir de migrants seuls au milieu de la mer. Car une fois l'argent empoché, les passeurs abandonnent parfois des embarcations pleines à craquer. On se souvient également du Blue Sky M, un cargo à la dérive avec à son bord plus de 900 migrants.

Jetés par-dessus bord. La presse italienne, comme Il Mattino, rapporte mercredi l'arrestation d'un passeur en Sicile. En plus d'être complice de trafic d'êtres humains, l'homme est accusé d'avoir jeté par-dessus bord un migrant mort dans le trajet. Le passager aurait succombé après avoir respiré des gaz d'échappement, avant d'être abandonné aux courants et aux prédateurs marins.

"Gardez les migrants, rendez le bateau". Quand les trafiquants n'abandonnent pas les migrants, ils refusent à tout prix de perdre leur unique investissement : l'embarcation. L'agence des frontières européennes Frontex a rapporté mardi deux épisodes frappants.

Après être venu au secours de 250 migrants près des côtes libyennes, Tyr, un navire des garde-côtes islandais, a été attaqué par des hommes sur un hors-bord. "Les trafiquants d'êtres humains ont tiré plusieurs coups de feu (en l'air) lundi pour récupérer l'embarcation en bois à bord de laquelle se trouvaient les migrants", a expliqué Frontex dans un communiqué. Le Tyr a préféré leur laisser la coquille de noix et repartir sain et sauf. En février, des passeurs armés de kalachnikovs avaient déjà obligé des garde-côtes italiens à leur rendre une embarcation dont ils venaient de secourir les passagers.

Pour Fabrice Leggeri, le directeur exécutif de Frontex, "cela veut dire que les trafiquants en Libye commencent à être à court d'embarcations et qu'ils sont davantage disposés à utiliser des armes pour récupérer celles ayant déjà servi".

>> Réécoutez l'interview de Philippe Leclerc, représentant du Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés auprès de la France :

"Des gens qui ont tout perdu et n'ont plus rien...par Europe1fr

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