Armée US : les gays toujours muselés

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Rémi Duchemin (avec agences)
Le tabou sur l’homosexualité dans l’armée américaine ne sera pas levé, a décidé le Sénat.

L’appel du cœur de Lady Gaga n’aura pas suffi. Mardi, la chanteuse la plus populaire du moment avait appelé dans un discours énergique à l’abolition de la loi "dont-ask, don’t tell" ("ne demande rien, ne dis rien") régissant le tabou de l’homosexualité au sein de l’armée américaine. La star espérait infléchir le vote du Sénat, quelques heures plus tard, sur la question.

 

Mais l’institution américaine a décidé de maintenir le statu quo. L’examen de l’abrogation de la loi a été voté par 56 élus, soit quatre de moins que les 60 nécessaires à la simple ouverture d’un débat sur le sujet. Les sénateurs républicains ont fait bloc pour s'opposer à cette loi, soutenus par deux démocrates, contre l’avis de la Maison-Blanche.

 

"Nous allons continuer"

 

L’abrogation de cette loi votée en 1993 était en effet l’une des promesses de campagne du candidat Barack Obama. "Nous sommes déçus de ne pas pouvoir faire avancer ce texte, mais nous allons continuer à essayer de le faire", a assuré le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, lors de son point de presse. "Ils sont d'accord pour risquer leurs vies pour les Américains, et nous disons non", a déploré le numéro deux de la majorité démocrate Richard Durbin.

 

Au moment de son adoption en 1993, le "don’t ask-don’t tell" représentait un vrai progrès par rapport à la situation existante. L’orientation sexuelle faisait partie des critères de sélection de l’armée, et les homosexuels en étaient systématiquement exclus. L’administration Clinton, partagé entre sa volonté et l’opposition des militaires et des républicains sur la question, avait coupé la poire en deux en adoptant un principe simple : la loi du silence. Un militaire n’a pas le droit de révéler son orientation sexuelle, ni même d’évoquer le sujet. Parallèlement, la hiérarchie n’a pas le droit d’ouvrir une enquête si un comportement prohibé n’est pas constaté.

 

L’opinion est prête

 

Car c’est bien là la faiblesse de cette loi : l’homosexualité reste interdite dans l’armée américaine. Selon les associations de défense des droits civiques, près de 14.000 soldats ont été renvoyés en raison de leur homosexualité depuis 1993. Aujourd’hui, l’opinion publique est prête au changement. Selon un sondage pour ABC News publié en 2008 au moment de la campagne électorale, 75 % des Américains estimaient qu’une personne ouvertement homosexuelle pouvait servir dans l’armée.

 

Barack Obama n’est d’ailleurs pas prêt à désarmer. Le président américain pourrait faire une nouvelle tentative lors de la session parlementaire allant de novembre à la fin de l’année. Après, il sera sans doute trop tard. Les nouveaux sénateurs, élus lors des élections de mi-mandat, le 2 novembre, entreront en effet en fonction. Et nombre de républicains devraient faire partie du lot.