Seine-Saint-Denis : huit fonctionnaires suspectés de détournement

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avec Marguerite Lefebvre et AFP , modifié à
ENQUÊTE - Avec huit autres personnes, ils sont soupçonnés d’avoir mis en place une fraude aux prestations sociales d’ampleur, dont le préjudice se chiffre en millions d’euros.

La juteuse combine a duré plus de dix ans. 16 personnes, dont huit employés du conseil général de Seine-Saint-Denis, ont été placées en garde à vue mardi dans le cadre d'une enquête sur une vaste escroquerie. Elles sont soupçonnées d’avoir d'avoir monté de faux dossiers de personnes âgées ou handicapées pour percevoir des prestations sociales. Cette vaste fraude, dont le préjudice se chiffre à plusieurs millions d’euros, a été mise au jour au printemps dernier par l’institution, à la faveur d’un audit interne.

Comment les agents ont réussi un tel escamotage? Les huit agents avaient accès à tous les ordinateurs et tous les fichiers informatiques du Conseil général. Ils pouvaient créer de faux dossiers grâce à de fausses identités.  C’est ainsi qu’un jeune homme de 28 ans a pu toucher une allocation réservée aux personnes âgées pendant plusieurs années. Deux prestations sociales dont la gestion est déléguée par l'Etat aux départements sont concernées : l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), destinée aux personnes âgées et dépendantes, et la prestation compensatoire du handicap (PCH), normalement réservée aux personnes handicapées.

Quelle est l’ampleur de l’escroquerie ? Cette vaste fraude, qui s’élève pour l’instant entre 3 et 4 millions d’euros, a profité à environ 70 personnes : les huit agents du Conseil général et certains de leurs proches, sur une période de dix ans. Avec les  employés, huit autres individus, extérieures à l’institution, ont été interpellés mardi, soupçonnés de complicité. Les suspects  auraient ainsi touché près de 100.000 euros par an en prestations sociales.

Comment a-t-elle été mise au jour ? La fraude a été découverte lors d'un audit interne des services du département, réalisé entre novembre 2013 et mars 2014. Après une plainte déposée par le conseil général, une enquête préliminaire pour "escroquerie", "abus de confiance" et "accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données" avait ainsi été ouverte au printemps.

"Insupportable au regard des principes de solidarité".  Le président du Conseil général de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, est aujourd’hui offusqué. "C’est incompréhensible et surtout insupportable au regard des principes de solidarité qui sont à la base de ces prestations. C’est quelque chose qui est profondément choquant", confie-t-il au micro d’Europe 1.  "C’est insupportable au regard de l’engagement des autres agents, qui font correctement leur travail", poursuit-il.  L’institution a d’ores et déjà annoncé qu’elle avait renforcé les contrôles pour éviter de nouvelles fraudes.  

Une escroquerie d’autant plus choquante que la Seine-Saint-Denis est l'un des départements qui cumule le plus de difficultés sociales en France.